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nuant le nombre des locataires dans chaque maison enregistrée, l’acte de 1851 introduit en plus grand nombre les pauvres dans celles que l’enregistrement n’a pas atteintes, soit que l’acte ne les ait pas désignées, soit que leurs propriétaires n’aient pas rempli les prescriptions légales. Ainsi donc, si toutes les maisons de logement ne sont pas enregistrées, et si l’on n’en construit pas un beaucoup plus grand nombre, l’acte de 1851 ne produira que des avantages très partiels et achetés au prix d’un plus grand encombrement des gîtes qui se trouvent dans les pires conditions.

Un fait très digne de remarque, c’est que les plus pauvres habitans des grandes villes sont ceux qui paient le plus cher le pied cube d’air qu’ils respirent et d’espace qu’ils occupent. Les loyers de Tyburnia et de Belgravia sont modérés en comparaison de ceux de Saint-Giles et de White-Chapel. Les bénéfices assurés aux logeurs devraient leur susciter une concurrence très active, mais les habitudes des cliens rendent le métier singulièrement rude et dégoûtent beaucoup de ceux qui seraient tentés de l’entreprendre. L’intempérance absorbe les ressources qui pourraient être affectées aux frais du minimum de décence requis dans les habitations humaines; elle encourage, elle oblige même le logeur, par toutes les peines et les dégâts qu’elle entraîne à sa suite, à surélever le montant du loyer, tandis que d’un autre côté elle diminue les moyens de le payer.

On voit combien la Grande-Bretagne, malgré les progrès dont elle est justement fière, est encore loin d’assurer à tous ses enfans les avantages auxquels peut prétendre en tout pays chaque membre du corps social. Quand parviendra-t-elle à combler cette profonde lacune qui peut-être ne préoccupe pas assez sérieusement ses hommes d’état et ses philanthropes? Je l’ignore; mais en présence de cette plaie si désolante on a peine à comprendre ces diatribes si violentes contre les états italiens par exemple, à qui l’on fait un crime irrémissible de la mendicité qu’ils tolèrent. La mendicité n’est pas moins tolérée à Londres, et le gueux des Apennins, qui, drapé dans sa souquenille, demande fièrement l’aumône sur la piazza del Popolo, aurait l’air d’un empereur romain à côté des larves humaines accroupies tous les jours aux coins des beaux carrefours du West-End.


II. — LA RÉFORME PÉNITENTIAIRE. — PENTONVILLE, MILLBANK, ETC. — LES PRISONS EN IRLANDE.


Le code criminel de l’Angleterre était, dans les premières années de ce siècle, le plus sanguinaire de l’Europe : il n’y a pas plus de trente ans qu’il punissait encore de la peine capitale le vol d’une somme de 5 shillings. Chez ce peuple à qui nous devons l’institu-