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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 17.djvu/363

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bunaux (Matthieu, X, 16), le récit de l’intervention de Gamaliel en faveur des apôtres dont on voulait empêcher les prédications (Actes, V, 17), les préceptes de saint Paul sur les devoirs des chrétiens envers les magistrats (Romains, XIII), et l’un des chants de reconnaissance de David (Psaume XCV, 1-7). »

Pendant ce temps-Là, le procureur-général, animé d’un esprit plus pratique, se pourvoyait en cassation contre l’arrêt de la cour d’Orléans. Il ne put en faire casser la conclusion, grâce à un point de fait soulevé et résolu en faveur de Doine; mais il en fit casser les motifs avec une clarté et une énergie qui raffermirent singulièrement dans la main de l’administration le sceptre que la cour d’Orléans avait tâché de lui ravir. La cour de cassation décida, le 12 avril 1838, qu’il n’y avait rien de prémédité dans la réunion provoquée par Doine, qu’elle était temporaire, accidentelle, formée spontanément sans accord préalable, et qu’à ce titre elle ne tombait pas sous le coup de la loi; mais elle déclara hautement que l’art. 5 de la charte se conciliait avec l’art. 291 du code et avec la nécessité d’obtenir l’autorisation préalable du gouvernement, que les art. 291 et suivans n’étaient nullement abrogés par la charte, qu’au contraire la loi du 7 vendémiaire an IV, inconciliable avec les articles organiques et le code pénal, était abrogée, enfin que l’article 291 du code avait reçu une sanction nouvelle de la loi du 10 avril 1834.

Ainsi était renversée d’un souffle la doctrine de la cour d’Orléans, et les deux adversaires se retrouvèrent dans leur situation naturelle, — la loi du 7 vendémiaire an iv éclipsée par les articles organiques, et la charte sous l’étreinte du code pénal. Désormais la toute-puissance de l’administration était assurée, et mentionner ses luttes, c’est énumérer ses victoires. En 1843, la commune de Senneville, renonçant au culte catholique, veut exercer le culte protestant dans une chapelle dont quarante-neuf habitans de cette commune étaient conjointement propriétaires. L’autorisation municipale est refusée. Des troupes entourent la chapelle pour y prévenir la réunion des fidèles; le pasteur est poursuivi, condamné une première fois à Mantes comme chef d’une association non autorisée, une seconde fois à Versailles, une troisième fois enfin par la cour de cassation dans son arrêt du 22 avril 1843, et toujours au nom de l’article 291 du code et de la loi du 10 avril 1834. Quelques habitans de Senneville persistèrent sans doute dans leur changement de religion, car nous voyons en juin 1844 un pasteur appelé dans cette commune pour accompagner un protestant à sa dernière demeure; mais le pasteur trouve au cimetière le maire, escorté de quelques gendarmes, qui lui enjoint de ne procéder à aucune cérémonie religieuse et de ne prononcer aucun discours sur cette tombe. Le pasteur