différentes branches de compagnonnage. Le costume théâtral et romanesque des foresters, les riches écharpes des odd fellows, les houlettes des shepherds (bergers), la pompe du cortège, les enseignes et les bannières déployées sur lesquelles on lisait : « Bonne foi, — amitié, — nous soutenons la veuve et l’orphelin, » tout cela composait une scène touchante qui se terminait par un banquet dans un jardin de plaisir ou au Crystal-Palace. On évalue à vingt mille le nombre de ces franc-maçonneries ouvrières qui existent aujourd’hui en Angleterre ou dans le pays de Galles; le chiffre des membres affiliés excède deux millions, et l’ensemble des fonds s’élève à plus de 9 millions de livres sterling. La forte personnalité du caractère anglais, qui sans cela dégénérerait volontiers en égoïsme, a pour correctif ces associations, qui entretiennent entre les ouvriers des liens de famille. D’autres fois les tavernes ajoutent aux agrémens de leur spécialité des sujets d’attraction plus frivoles. Le baron Nicholson siège tous les soirs dans un de ces établissemens de Londres (cider cellars) avec toute la pompe de son double menton, de sa robe officielle de grand-juge et de sa perruque blanche; il appelle à la barre de son tribunal, assisté d’un nombreux jury, les accusés et les témoins. Ce sont des scènes de la vie privée assez amusantes, mais où le père ne conduit point son fils. Je ne parlerai point des salles de concert, ni des salles de danse, que plusieurs tavernes de Londres ont ouvertes dans ces derniers temps, mais qui changent plus ou moins le caractère de ces établissemens, et qui nécessitent d’ailleurs une license spéciale.
Au sortir d’un public-house des grandes villes, on aime à secouer cette atmosphère chargée de fumée, de bruit, de poussière, et trop souvent de mauvaises paroles pour reposer ses yeux sur une modeste auberge de village anglais. Près d’une mare dans laquelle s’ébattent des oies ou barbotent des canards, s’élève une vieille maison autour de laquelle une vigne française noue ses bras vigoureux. Cet arbre est heureux, il ne regrette point la patrie. Un abreuvoir toujours plein invite les chevaux à s’arrêter et à tremper dans l’eau claire leur bouche altérée. Une enseigne rouillée, suspendue à une tige de fer, laisse deviner une image à demi effacée par la pluie. Là, tout respire le calme, et pour ainsi dire la bonne conscience de la maison. L’intérieur est propre, net, joyeux : une chambre d’entrée avec des pots d’étain rangés par ordre d’importance le long d’une planche clouée au mur, et auxquels une main vigilante a donné l’éclat de l’argent, — un parlour aux murs blanchis à la craie, au plancher doré d’un sable fin, avec des bancs de bois, des tables, — une vieille horloge à poids qui anime la chambre d’un monotone tic tac, — des gravures représentant des scènes