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« Les mêmes considérations, reprend le mémorandum français, qui doivent rendre désirable que la Valachie et la Moldavie soient placées sous le même gouvernement exigent aussi, pour que ce gouvernement possède toutes les conditions de force et de durée, qu’on y établisse un système approchant autant que possible de la forme monarchique, laquelle peut seule répondre au but qu’on a en vue. Un pouvoir temporaire laisserait le champ libre aux brigues et aux luttes des partis, et faciliterait ainsi le retour de l’influence qu’on veut essayer de détruire. Un pouvoir nommé à vie aurait à peu près les mêmes inconvéniens, car les changemens de personnes, pour être moins fréquens, ne soulèveraient pas moins d’ambitions et ne provoqueraient pas moins d’intrigues. L’histoire des principautés a été en quelque sorte la triste expérience de ces deux systèmes. L’autorité suprême devrait donc être héréditaire, si l’on veut qu’elle puisse remplir avec succès la tâche importante qui lui serait assignée. Nous ne connaissons pas l’opinion de la Porte sur cette question de la succession héréditaire. Dans tous les cas, le fait ne serait pas nouveau pour elle. La famille des Milosch en Servie avait obtenu du sultan Mahmoud le privilége des transmissions héréditaires. Le même droit fut accordé aux descendans de Méhémet-Ali en Égypte ; il continue encore à y régler la transmission du pouvoir. La Porte, dans ces concessions, n’a rien vu d’incompatible avec ses droits souverains ni avec les principes d’intégrité de son empire : elle ne pourrait donc avoir aucune objection fondamentale contre un arrangement qui serait si favorable à ses intérêts sur la rive gauche du Danube. — Il y aurait deux voies à suivre, soit de nous borner pour le moment à proclamer le principe de la succession héréditaire conférant la souveraineté avec un titre à convenir à un prince du pays,… ou bien de trancher sur-le-champ la question en recourant à un prince d’une des familles souveraines de l’Europe, mesure qui serait peut-être la meilleure. — Ceci fut, on s’en souvient, la combinaison mise en avant pour la Grèce à une époque où les puissances qui aidèrent à la constituer croyaient qu’il y avait encore quelque possibilité de la laisser sous le pouvoir suzerain de la Porte… — Cela résulte du protocole de la conférence de Londres en date du 22 mars 1829. L’importance de la nouvelle principauté (la Moldo-Valachie), tant par suite de sa position politique que du chiffre de sa population, assurerait à une dynastie chrétienne des avantages suffisans pour qu’une condition de vasselage ne soulevât pas d’objection sérieuse[1]. »

J’ai cité presque tout entier ce mémorandum du 26 mars 1855

  1. Ubicini, pages 7, 8, 9, 10.