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6 millions d’hectares de plus à la nourriture des animaux, et par conséquent à la production des fumiers, grâce à des marnages, des irrigations, des assainissemens, des labours mieux faits, le rendement de toutes les cultures s’est élevé. Le froment, qui ne donnait en moyenne que 8 hectolitres à l’hectare, semence déduite, en a donné 12, et comme en même temps l’étendue semée s’est accrue, la production totale a doublé. Le même fait s’est présenté pour le bétail, qui, recevant deux fois plus d’alimens, a grandi à la fois en nombre et en qualité, de manière à doubler ses produits ; les cultures industrielles se sont développées, la soie et le colza ont quintuplé, le sucre indigène a pris naissance, le vin a doublé. Il n’y a pas jusqu’au bois qui, mieux défendu contre la dent des animaux, mieux exploité en vue des nouveaux débouchés, n’ait augmenté ses produits annuels, mais trop souvent aux dépens du capital.

Le prix moyen du blé ne paraît pas avoir changé. Arthur Young dit que le pain de froment se payait 3 sols la livre, et le pain de seigle, que mangeait communément le peuple, 2 sols; s’il y a une différence, elle est plutôt en moins. La viande a haussé; Arthur Young dit qu’elle se vendait 7 sols la livre sur l’étal, ce qui suppose une moyenne de 6 sols ou 30 centimes pour le producteur. La moyenne actuelle doit être de 30 centimes ou 8 sols par livre, elle aurait alors augmenté d’un tiers. Ce prix de 40 centimes paraîtra sans doute bien faible, surtout aux Parisiens ; mais c’est du prix des campagnes qu’il s’agit, avant que la viande ait été chargée des frais de transport, des droits de marché, d’abattoir et d’octroi, des bénéfices des marchands de bœufs et des bouchers, du loyer et de l’entretien des étaux, tous frais beaucoup plus considérables aujourd’hui qu’autrefois, et qui doublent la valeur de la denrée avant qu’elle arrive chez le consommateur des grandes villes. Arthur Young porte le vin à 4 sols 6 deniers la bouteille; comme le prix du vin varie extrêmement, suivant l’âge, la qualité, le lieu où on le boit, etc., il est difficile de tirer de cette indication aucune conclusion positive. Je crois cependant qu’à prendre les choses dans leur ensemble, le prix du vin n’a pas beaucoup plus changé que celui du pain; il a dû hausser dans la plupart des lieux de production et baisser partout ailleurs par suite du perfectionnement des communications.

En acceptant les données de Lavoisier pour 1789, celles de Chaptal pour 1815, et celles de la Statistique générale de France pour 1848, on arrive à l’aperçu suivant des principales productions agricoles à ces trois époques :


1789 1815 1848
Froment (semence déduite) 34 millions d’hectolitres 44 id. 70 id.
Seigle et autres grains (—) 46 id. id. 44 id. 40 id.
Pommes de terre 2 id. id. 20 id. 100 id.