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LA MONARCHIE
DE LOUIS XV

IV.
LE GOUVERNEMENT DE Mme DE POMPADOUR.



En quittant le ministère du cardinal de Fleury pour aborder le gouvernement personnel de Louis XV, j’éprouve un embarras que je n’hésite point à confesser. Dans le cours de mes études antérieures, que ces études se rapportassent à la fondation de notre nationalité ou bien à la décadence encore latente de la monarchie française, j’ai pu grouper les faits autour de quelques noms propres, et lier les innombrables accidens de l’histoire aux intérêts généraux qui les avaient suscités. Rien de semblable n’est possible de 1743 à 1774. Le caprice avec tout l’imprévu de ses fantaisies, la passion avec ses alternatives de découragement et d’audace, gouvernèrent la France depuis l’instant où s’éteignit le vieux ministre qu’on avait vu poursuivre dix-huit ans sa pacifique pensée jusqu’à l’heure où s’acheminèrent nuitamment vers Saint-Denis les restes insultés du prince qui s’était appelé le Bien-Aimé. La nation fut ballottée, trente ans durant, par des idées politiques disparates et contradictoires, qui, n’ayant de commun que leur impuissance, la détachèrent de son roi sans la rattacher à rien ni à personne. Janséniste ou moliniste tour à tour, suivant qu’il a besoin de l’enregistrement des cours de