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puis celui des annelés, enfin celui des vertébrés. Il n’en est rien; les quatre embranchemens ont été simultanément représentés dans les terrains les plus anciens. Ainsi les mollusques ne sont point des rayonnes perfectionnés; les vertébrés ne sont point des annelés perfectionnés. Les partisans de la doctrine des transformations peuvent répondre : « Nous admettons que les quatre embranchemens dont est composé le règne animal aient paru depuis l’origine des temps; mais peut-être n’étaient-ils représentés que par leurs membres les moins parfaits. Peut-être les divers êtres d’un même embranchement sont-ils le résultat de transformations successives. » Cette question a trop de gravité pour n’être pas étudiée avec quelque détail ; pour la résoudre, il faut passer en revue chacun des quatre embranchemens. Voyons d’abord les rayonnés. Les plus imparfaits des rayonnés sont les éponges et les foraminifères ; les plus parfaits sont les échinodermes. Si les êtres eussent marché dans une voie de progrès, les éponges et les foraminifères auraient paru les premiers, les échinodermes les derniers. Or nous voyons le contraire : les ordres d’échinodermes sont plus nombreux dans les terrains anciens que ceux des foraminifères et des éponges. Les mollusques ne nous offrent pas des indices plus satisfaisans pour la théorie du perfectionnement des êtres; toutes les classes de ces animaux ont existé simultanément dès les premières périodes géologiques, et les céphalopodes, qui sont les mollusques dont l’organisation est la plus élevée, ont dans ces âges anciens un développement extraordinaire. Comme les deux embranchemens précédens, celui des annelés a toutes ses classes représentées dès les premiers temps du monde; les coléoptères, les plus parfaits des insectes, ont laissé leurs débris dans les terrains anciens. Le quatrième embranchement du règne animal, celui des vertébrés, fournit des faits moins défavorables à la théorie de la transformation des êtres. En effet, si les poissons et les reptiles ont vécu dès l’époque de transition, les oiseaux et les mammifères ont apparu assez tard dans l’histoire du globe. Comme ces animaux sont à la fois les plus connus et les plus parfaits du règne organique, on a conclu de leur arrivée tardive dans le monde que l’organisation avait été en se perfectionnant depuis les temps anciens jusqu’à nos jours. Cette conclusion, suivant d’Orbigny, n’est point rigoureuse, puisque sur quatre embranchemens trois tendent à renverser la théorie du perfectionnement, et que, même dans le quatrième, deux classes sur quatre fournissent des argumens contre cette théorie.

D’ailleurs il n’est pas encore absolument prouvé que les oiseaux et les mammifères n’aient pas existé dans les anciennes époques géologiques. Il y a quelques années, on connaissait seulement quatre espèces de mammifères fossiles dans les terrains secondaires. Ces