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LA
LITTÉRATURE DU PRÉSENT
EN ALLEMAGNE



Il n’est pas facile de porter un jugement exact sur la situation des lettres allemandes. Jamais peut-être la confusion n’a été plus grande dans le domaine de l’imagination et de la critique. Beaucoup de talens, beaucoup de forces dispersées, une activité souvent intéressante, une élévation assez sensible du niveau général, mais nul lien, nulle communauté d’efforts, en un mot ni maîtres ni écoles, voilà l’aspect que nous offre à première vue le mouvement littéraire de l’Allemagne. A vrai dire, c’est le chaos. Est-ce un chaos fécond? n’est-ce qu’une agitation stérile? Voilà pour nous toute la question, et c’est parce que cette question intéresse la vie intellectuelle de notre temps que nous continuons de suivre avec sollicitude le développement des lettres germaniques.

Certes, si l’on n’interroge que les sévères travaux de l’intelligence, histoire, philosophie, érudition, critique théologique, philologie comparée, l’Allemagne est toujours un vivant foyer d’études. Les universités sont aussi actives que jamais, les académies font des publications importantes, les congrès de philologues, qui chaque année se transportent de ville en ville, entretiennent dans l’armée des savans l’ardeur et la discipline, ou provoquent, au bénéfice de tous, des discussions d’une portée considérable. Il y a là ce qui manque dans un autre domaine, des chefs de corps et des groupes distincts. Est-il nécessaire de citer MM. Jacob et Wilhelm Grimm, qui continuent avec tant de zèle et de succès ce dictionnaire monumental où se