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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 20.djvu/526

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chrétiens en Orient. Comme protecteur, il ne leur aurait pas, je pense, laissé beaucoup d’indépendance; mais les petits états ne pouvaient pas de ce côté demander plus que les grands états eux-mêmes.

En 1809, la Porte-Ottomane céda à la France les droits qu’elle avait sur les Iles-Ioniennes; comme elle n’avait sur ces îles qu’un droit de suzeraineté, elle ne put céder que ce qu’elle avait. Les Sept-Iles changeaient de suzerain et de protecteur; mais elles continuaient de faire un état indépendant, et en février 1809 l’ambassadeur d’Angleterre près la Porte-Ottomane déclarait officiellement « qu’aux yeux du gouvernement britannique, qui avait refusé de reconnaître les transactions de Tilsitt, la convention du 21 mars 1800, » par conséquent l’indépendance de la république des Sept-Iles « n’avait jamais cessé d’être en vigueur. »

Dès 1809 et 1810, les flottes britanniques avaient attaqué les garnisons françaises qui occupaient les îles, et les avaient expulsées, ou plutôt elles avaient délivré les Iles-Ioniennes du joug des Français. C’est ainsi que s’exprimait le général Oswald dans la proclamation qu’il adressait au mois d’octobre 1809 aux habitans de Zante et de Céphalonie : « Des avis réitérés parvenus aux commandans des forces de mer et de terre de sa majesté britannique dans la Méditerranée leur ayant donné l’assurance que les habitans de ces îles voulaient secouer le joug oppressif du gouvernement français, le vice-amiral lord Collingwood et le lieutenant-général sir John Stuart ont été autorisés par sa majesté à leur offrir les secours nécessaires pour chasser leurs oppresseurs, et afin de rétablir chez eux un gouvernement libre et indépendant... Les Anglais, disait encore la proclamation, ne se présentent pas comme des conquérans, mais comme des alliés qui viennent apporter aux Ioniens les avantages de la protection britannique et relever leur liberté et leur commerce. »

Voilà avant 1814 l’histoire des Iles-Ioniennes. Nées en 1800 du contre-coup de nos conquêtes en Italie, reconnues en 1802 par le traité d’Amiens, c’est-à-dire parle traité qui, en essayant l’alliance de la France et de l’Angleterre, inaugurait la nouvelle et la vraie politique de notre siècle, gardant leur drapeau par l’expresse volonté de Napoléon, proclamées indépendantes le jour même où elles sont délivrées par les Anglais, les Iles-Ioniennes arrivaient devant le congrès de Vienne comme un des nombreux états européens laissés sans maître par la chute de Napoléon, comme la Hollande, comme la Hesse, comme la Savoie, comme le Piémont; mais la Savoie, la Hollande, la Hesse et tant d’autres petits états de l’Allemagne retrouvaient leurs anciens maîtres, qui venaient les revendiquer, et cette revendication faisait à l’instant même leur indépendance. Les Iles-Ioniennes ne retrouvaient pas Venise pour les