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montagnes, dont les parties ont un instinct et une volonté, c’est là un cas exceptionnel d’aberration scientifique dont il n’y a rien à conclure.

Toutefois on peut encore taxer d’imprudence bien des cosmologues, et M. de Filippi lui-même ne s’est pas toujours montré suffisamment prudent dans ses Lettres sur la Création terrestre. La science n’est pas une métaphysique qui raisonne sur des données inaccessibles à nos sens; elle ne se compose que de faits. Sans doute elle peut commettre des erreurs, et elle en commet tous les jours; mais ces erreurs tiennent à des observations incomplètes, et finissent bientôt par être rectifiées. Il n’en est pas de même des connaissances purement spéculatives; une opinion en remplace une autre, un système renverse un système, sans qu’on voie s’accroître les moyens de déterminer l’étendue des erreurs commises. Si l’on ne veut que le roman historique des premiers âges de notre planète, nous en savons assez pour le pouvoir composer; mais si l’on prétend établir d’après les faits la succession des phénomènes primordiaux, il faut poursuivre encore bien des recherches et des observations, et nous devrons, en attendant, nous contenter d’aperçus généraux. Les hypothèses que nous avons examinées, et qui sont fondées sur des observations positives, nous suffisent pour avoir une idée générale de la manière dont les choses se sont passées dans le principe : elles nous font assister à l’embryogénie du monde; elles nous conduisent à l’époque où la vie organique s’est développée sur le globe.


ALFRED MAURY.