Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 21.djvu/470

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou deux aide la convalescence, au lieu de l’arrêter. Paolo courait d’ailleurs des dangers bien autrement graves en prolongeant son séjour dans le Milanais, et son départ fut décidé; il fut convenu que Paolo partirait pour le Piémont, et que son père l’accompagnerait jusqu’à la frontière. Pietro aurait voulu les suivre, mais le fermier jugea prudent de laisser la ferme sous sa garde, et de n’emmener avec lui, outre le fugitif, qu’un de ses plus jeunes fils, Orazio, celui qui avait déjà facilité l’évasion de Filippo.

Un soir, après que les domestiques et les ouvriers se furent couchés, Pietro, Cesare et Orazio attelèrent sans bruit la calèche qui était sous un hangar, au fond de la cour principale. Ils ouvrirent ensuite une porte qui donnait de la remise même dans les champs, et ils conduisirent la voiture, attelée de deux forts chevaux, à quelque distance de la maison, sur la route de Pavie. Là ils allumèrent les réverbères, et Orazio s’installa sur le siège, tandis que Pietro et Cesare rentraient à la ferme. Toute la famille était rassemblée dans la chambre de Paolino; tous pleuraient, et les pleurs redoublèrent à l’arrivée des deux frères qui donnaient le signal du départ.

— Allons, mes enfans, finissons ces tristes adieux; épargnez votre pauvre mère...

Un coup frappé violemment à la porte extérieure du bâtiment interrompit le signor Stella. La même pensée traversa aussitôt tous les esprits. La police était là. — Descendez par l’escalier dérobé, dit à voix basse le fils aîné à son père; passez par la porte de derrière dont voici la clé, gagnez la voiture qui vous attend avec Orazio sur la route de Pavie, et laissez-nous occuper la police. Vite, pas un mot! partez.

L’épouvante avait en quelque sorte vaincu la douleur. Tous les yeux étaient secs. Le vieux Stella embrassa sa femme, dit adieu au reste de la famille, et, saisissant son fils par le bras, il l’entraîna, suivi de Pietro, qui voulait les voir hors des murs de la ferme avant d’introduire la police.


CHRISTINE TRIVULCE DE BELGIOJOSO.