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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 21.djvu/890

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avec la plus grande douceur aux pauvres pécheurs qui se repentaient de leurs péchés.

« Ah ! n’aimeriez-vous pas un tel homme si vous le connaissiez, s’il habitait ce village ? Quel bon cœur il aurait ! Quel ami il serait dans les jours de douleur ! Combien il serait aimable d’être enseigné par lui !

« Eh bien ! mes amis, quel était cet homme ? Était-ce seulement un homme excellent, un homme de vertus supérieures, comme le cher M. Wesley que Dieu nous a retiré, et pas davantage ?… C’était le Fils de Dieu, la figure du Père, dit la Bible, ce qui signifie précisément égal à Dieu, qui est le commencement et la fin de toutes choses, à ce Dieu que nous avons besoin de connaître. Nous pouvons comprendre ce que Jésus sentit parce qu’il vint dans un corps comme le nôtre, et s’exprima par des paroles, comme nous nous exprimons nous-mêmes. Auparavant nous tremblions de penser à ce qu’était Dieu, le Dieu qui a fait le monde et le ciel, et le tonnerre et les éclairs. Nous ne pouvions pas le voir, nous pouvions seulement voir les choses qu’il avait faites, et quelques-unes de ces choses étaient vraiment terribles, si bien qu’il y avait de quoi trembler en pensant à lui. Mais notre bien-aimé Sauveur nous a montré ce qu’est Dieu sous une forme que nous avons pu comprendre, nous pauvres gens ignorans, il nous a montré ce qu’est le cœur de Dieu, quels sont ses sentimens pour nous.

« Mais voyons d’un peu plus près pourquoi Jésus est venu sur la terre. Une fois il dit : « Je suis venu pour chercher et sauver ceux qui sont perdus, » et une autre fois il a dit : « Je ne suis pas venu en ce monde pour les justes, mais pour les pécheurs. » Les pêcheurs, ceux qui sont perdus… Ah ! chers amis, ces expressions vous désignent-elles vous et moi ?… » Puis, s’enflammant de plus en plus, Dinah fait un appel direct, quasi matérialiste, à l’imagination de ses auditeurs.

« Voyez, s’écria-t-elle, se tournant à gauche, fixant les yeux sur un point de l’horizon, au-dessus des têtes de la foule ; voyez notre bien-aimé Seigneur qui vous regarde en pleurant et qui étend ses bras vers vous. Écoutez ce qu’il dit : « Combien de fois n’ai-je pas voulu vous attirer à moi, comme la poule qui réunit ses poussins sous ses ailes ! » Et vous n’avez pas voulu, vous n’avez pas voulu ! répéta-t-elle sur un ton de suppliant reproche, en abaissant les yeux sur la foule. Voyez la marque des clous sur ses mains et ses pieds. Ce sont vos péchés qui ont fait ces marques ! Oh ! quel visage pâle et dévasté ! Il a souffert cette grande agonie dans le jardin des Oliviers, lorsque son âme était triste jusqu’à la mort, et que les grosses gouttes de sueur et de sang tombaient à terre. Ils ont craché sur lui et ils l’ont souffleté, ils l’ont fouetté, ils l’ont raillé, ils ont chargé de la croix ses épaules meurtries, ensuite ils l’ont crucifié. Ah ! quelle souffrance ! Ses lèvres sont sèches de soif, et ils le raillent encore dans cette cruelle agonie, et cependant de ces lèvres desséchées il prie pour eux. « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font. » Puis l’horreur des grandes ténèbres s’appesantit sur son âme, et il sentit ce que les pécheurs sentent lorsqu’ils sont pour toujours séparés de Dieu. Ce fut la dernière goutte dans la coupe d’amertume. « Mon Dieu, mon Dieu, cria-t-il, pourquoi m’avez-vous abandonné ? »

« Il supporta tout cela pour vous ! pour vous, et vous ne pensez jamais à