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Fumer à travers les bouleaux ;
Par là, les pauvres gens viennent tous les dimanches
S’asseoir sur les degrés aux larges dalles blanches,
Bâton en main, besace au dos.

Aux voyageurs amis la lourde porte verte,
Du printemps à l’automne, est toute grande ouverte.
Arrive un poudreux pèlerin :
On lui fait place à table, à droite de l’hôtesse,
Et pendant le dessert, en signe d’allégresse,
On vide un flacon de vieux vin.

Le soir, en cercle assis près d’un feu de javelles[1],
À la lueur de l’âtre on se dit les nouvelles,
Tandis que jase le grillon ;
Puis dans la toile fraîche on s’étend, on sommeille,
Et dès le fin matin un pâtre vous éveille
Au bruit de son chant berrichon.

Simple maison !… Souvent à son toit solitaire
Ton hôte revenu voit comme une ombre chère
Ta cour où se penche un noyer,
Et ta grand’salle basse où vient la châtelaine
Avec les vendangeurs, tout en filant sa laine,
Causer sous l’abri du foyer.


VII. — LE MOULIN DES AGES


A M. Frédéric de Holzhausen


Dans les prés, la rosée a baigné l’herbe mûre ;
Tout luit, le soleil pose une aigrette de feu
Sur l’épi qui fleurit, sur l’arbre qui murmure :
Dans le ciel tout est bleu.

Au bas d’un rocher gris qui se penche et surplombe,
La rivière bouillonne au sortir d’un moulin,
Et l’on entend au loin le bruit de l’eau qui tombe
En jetant son écume aux saules du chemin.

Là-bas, dans un îlot tout couvert de ramée,
Le moulin se dérobe aux regards, et l’on voit
Seulement vers le soir un filet de fumée
Au-dessus de son toit.

  1. Fagots de sarment.