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l’identité. La prodigieuse variété des effets de l’électricité avait conduit les savans à distinguer dans la production de ces phénomènes des causes essentiellement différentes. On admettait une électricité positive et une négative, deux fluides électriques et deux fluides magnétiques, une électricité statique et une électricité dynamique. En un mot, on comptait presque autant de causes qu’il y avait d’effets produits. On vient de voir qu’on prenait pour des principes différens des effets dus à une simple question de quantité ou à une variété de circonstances. Par exemple, l’électricité développée dans la pile voltaïque et celle à laquelle les machines électriques donnent naissance semblaient tout d’abord complètement dissemblables. Il n’y a pas de tension électrique dans le premier de ces appareils : les réactions magnétiques opérées par les courans de haute tension sont fort différens de ceux que fournissent les courans de nature voltaïque ; mais le perfectionnement des appareils et l’étude plus attentive des faits ont rapproché des phénomènes d’une nature en apparence disparate. Un habile constructeur de machines, M. Ruhmkorff, a inventé un appareil d’induction appelé bobine, dans lequel les courans électriques acquièrent une tension aussi énergique que celle de l’électricité des machines. D’un autre côté, on a construit des piles, dites piles sèches, dans lesquelles l’électricité produite est d’une nature tout à fait statique, comme celle des machines. Une forte accumulation d’électricité positive et d’électricité négative s’y opère à chacun des pôles, et des étincelles électriques y apparaissent. De là est venue l’idée que l’électricité produite par les machines actuellement en usage et celle qu’on développe par les courans voltaïques ne diffèrent que par des degrés. Dernièrement un expérimentateur français, M. Gaugain, s’est convaincu que la loi d’intensité du courant électrique, reconnue pour les courans proprement dits, s’applique parfaitement au cas du mouvement lent produit quand on laisse écouler dans le sol l’électricité que fait naître une machine à frottement. Ajoutons enfin que les expériences de M. Faraday sur la vitesse de propagation de l’électricité ont mis en évidence la liaison étroite qui existe entre l’électricité statique et l’électricité dynamique. On savait déjà, grâce aux recherches de M. Colladon, que l’on peut produire un courant, accusé par nos instrumens, en soutirant, à l’aide d’une pointe, l’électricité statique accumulée sur un conducteur isolé. M. Faraday a fait l’inverse : il a réussi, en lançant le courant d’une pile voltaïque dans un long conducteur isolé, à le charger d’électricité statique. De nouvelles expériences compléteront encore ces démonstrations ; mais il demeure évident qu’il ne faut point parquer dans des zones différentes du champ de l’électricité des phénomènes qu’on avait jugés à tort disparates.