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sur ce grand sujet quelques idées auxquelles nous sommes conduit par l’étude du passé et par la comparaison des temps présens? Que le pouvoir temporel du pape soit incompatible avec l’unité italienne, nous l’avouons sans difficulté; mais l’histoire ne démontre pas que ce pouvoir soit inconciliable avec le système d’une confédération. La présidence honoraire du pape, entraînant vraisemblablement le siège de la diète italienne dans la ville des grands souvenirs, n’aurait même rien qui nous effrayât, si la papauté pouvait se décider à reconnaître que la liberté des opinions politiques et religieuses est la condition essentielle de la responsabilité humaine, que l’homme ne vaut que parce qu’il est moralement libre. Nous comprendrions un établissement qui se rapprochât des idées de l’illustre et malheureux Rossi, lequel entendait bien que le chef des états de l’église, précisément à cause de son caractère pontifical, fût protégé par la fiction constitutionnelle, qu’on ne pût faire remonter jusqu’au prêtre les erreurs du souverain, qu’il continuât de régner avec une liste civile considérable et tous les attributs de la puissance séculière, mais entouré et couvert par des conseillers laïques dont l’administration se conformerait au véritable esprit moderne, celui de la tolérance, de l’équité, de la liberté dans l’ordre. A de telles conditions, le souverain pontife, père commun des fidèles, livré aux seules inspirations de son cœur et de sa conscience, ne pourrait-il pas, comme arbitre en dernier ressort, rendre d’utiles et éminens services, apaiser les rivalités, moraliser la politique, donner et laisser la paix de l’Évangile? Qui empêcherait d’attribuer alternativement la présidence effective et réelle de la diète fédérale au Piémont et à Naples, deux états géographiquement et politiquement destinés à se faire équilibre, pourvu que Naples, bien entendu, acceptât les institutions représentatives? Un pouvoir central aujourd’hui n’a chance de vivre qu’à la condition d’être intelligent et libéral. Serait-il impossible de trouver quelque combinaison politique qui permît de régir par des législations analogues les populations les plus rapprochées, de manière à développer plus largement entre elles les liens moraux de l’esprit public? Alors la diète fédérale pourrait être fortifiée par le concours des diverses représentations nationales; le conseil exécutif délégué par les gouvernemens siégerait à côté d’une députation issue des entrailles mêmes du peuple italien. Ne serait-ce rien que de faire de l’Italie une grande puissance maritime au moyen de ces ports magnifiques, Gênes, Livourne, Castellamare, Brindes, Ancône, Venise, devenus arsenaux fédéraux, remplis encore d’une population d’habiles marins chez qui les traditions de l’activité commerciale ou guerrière ne demandent qu’à renaître? Et cette armée fédérale à qui l’armée piémontaise offrirait des cadres si parfaitement organisés, n’y a-t-il