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tive chargée de préparer la rédaction d’un nouveau tarif, M. de Bruck développa publiquement, d’abord dans un article de la Gazette de Vienne, puis dans un mémoire adressé le 30 décembre 1849 au comité fédéral de Francfort, son projet d’union, et il demanda que l’on tînt sous un bref délai un congrès douanier où les représentans des divers états seraient appelés à discuter l’organisation nouvelle. Surpris par ce réveil de l’action autrichienne, inquiet des marques de sympathie qui se manifestaient dans plusieurs pays de l’Allemagne au sujet du plan d’union, le cabinet de Berlin, tout en paraissant accueillir en principe une idée qui devait être si avantageuse pour le corps germanique, et dont il revendiquait d’ailleurs l’initiative en rappelant la fondation du Zollverein, souleva des objections de forme, d’opportunité, de pratique, qui trahissaient visiblement son désir de faire échouer les propositions de l’Autriche. La question avait néanmoins été posée trop publiquement pour qu’il fût aisé de l’enfouir dans les archives diplomatiques. Ce n’était point aux chancelleries, c’était à l’Allemagne tout entière que l’Autriche venait de parler, et elle était résolue à déployer dans cette entreprise l’opiniâtre persévérance, la patiente vigueur qui de tout temps ont marqué sa politique.

Les objections de la Prusse fournirent à M. de Bruck le prétexte d’un second mémoire, dans lequel il ne s’agissait plus seulement d’exprimer une vague idée d’association. Le plan était développé cette fois avec détail et rédigé méthodiquement sous forme d’articles où les principales difficultés d’exécution se trouvaient résolues. En outre, le ministre autrichien se livrait à d’éloquentes considérations générales sur les avantages que procurerait à l’industrie allemande l’extension de ses marchés, sur la puissance politique et commerciale dont serait armée une confédération de soixante-dix millions d’âmes, sur le caractère vraiment national d’un projet qui devait constituer enfin, après tant d’efforts et d’échecs, l’unité de l’Allemagne, la patrie allemande! M. de Bruck allait plus loin encore : il promettait aux futurs confédérés comme un rayonnement irrésistible d’influence sur les contrées limitrophes; il leur montrait à l’horizon d’un avenir assez prochain l’Italie, la Hollande, la Belgique, le Danemark, se rattachant à l’union allemande, et lui ouvrant par de nombreuses issues l’accès de la mer, c’est-à-dire la grande route du commerce universel. Le Zollverein n’était qu’une institution restreinte, emprisonnée dans d’étroites limites : puisque cette institution avait été reconnue bonne et utile, pourquoi ne pas l’étendre à toute la surface de la confédération, au nord comme au sud? L’union donc, l’union générale, voilà ce que prêchait M. de Bruck, reprenant un à un les argumens qui avaient été invoqués par