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livre est consacré à la manifestation du caractère divin, non plus dans la nature, mais dans l’Écriture sainte, et l’auteur soutient avec la même justesse de sens et de langage contre le déisme une thèse correspondante à celle qu’il a soutenue dans les trois premiers livres contre l’athéisme. Ce morceau d’apologétique pourrait être plus étendu et plus développé; tel qu’il est, il ne manque pas de solidité, et rien de bien essentiel n’y est omis. Je le regarde comme un excellent abrégé des principes et des raisonnemens de la théologie orthodoxe contre le rationalisme encore chrétien ou purement philosophique. En tout, la lecture de cet ouvrage peut être conseillée à quiconque veut, sans se perdre dans l’examen technique et minutieux des controverses, se rendre raison des dogmes naturels et révélés, et prendre parti avec connaissance de cause dans un débat qui inquiète le monde. Je ne m’étonne pas que le livre du Théisme chrétien ait eu en Angleterre un succès très général, et qu’il en paraisse, par livraisons d’une feuille, une édition populaire.


IV.

Les deux ouvrages dont nous venons de parler représentent avec fidélité et avec une certaine distinction l’état d’esprit et le mouvement des opinions de nos voisins en ce qui touche la philosophie religieuse. On en pourrait citer d’autres d’un mérite moindre, mais qui auraient la même signification. Ce qui nous frappe particulièrement dans ceux-ci, c’est une connaissance et une préoccupation manifeste de la philosophie contemporaine. Les deux auteurs ne se montrent étrangers à aucune doctrine de quelque renom, et ils suivent les questions dans les dernières transformations qu’elles ont subies. Cependant on peut dire qu’ils écrivent en hommes qui savent la philosophie plutôt qu’en philosophes. Ils n’ont point à cœur d’établir, par la critique ou la discussion, quelque négation ou quelque vérité nouvelle. On sait d’avance quelle sera leur thèse, et d’avance on devine quels adversaires ils vont combattre. Il n’en est pas de même lorsqu’on ouvre le livre d’un philosophe proprement dit. S’il n’a pas encore produit de système, on se demande, avant de lire la première page, ce qu’il veut et à qui il en veut, et l’on commence avec incertitude et curiosité. C’est dans cette disposition d’esprit qu’on doit aborder un ouvrage qui a fait du bruit en Angleterre depuis un ou deux ans, sous ce titre significatif : Examen des Limites de la pensée religieuse. Sur ces mots seuls, on se doute qu’on a affaire à un ouvrage de philosophie.

L’auteur, M. Mansel, a débuté, je crois, par des Prolégomènes de Logique qui lui ont mérité les éloges de son maître, sir William Hamilton, dont il publie en ce moment avec M. Veitch les leçons iné-