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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 25.djvu/573

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la défense de l’erreur, et qu’elle profiterait même à des religions fausses ; bornons-nous à dire que c’est l’opposé de l’enseignement religieux dans tous les pays chrétiens. La réponse à la question : Qu’est-ce que Dieu ? contient dans tous les catéchismes catholiques une définition ou du moins renonciation d’une série d’attributs qui ne peut être comprise que par un acte de la raison pure, et le dogme de la Trinité y est ensuite expliqué en termes abstraits qui sont éminemment scientifiques. Avant de nous enseigner tous nos devoirs, on tient à nous apprendre envers qui ils nous lient. Je n’ai point sous les yeux les livres d’instruction chrétienne destinés à la jeunesse en Angleterre ; mais dans le Symbole d’Athanase, prescrit à l’église anglicane, je lis des passages, et dans les articles de foi qu’elle professe des articles, comme le premier et le second, qui expriment certainement de la métaphysique sacrée, et qui ne sont pas en eux-mêmes des préceptes de morale ou des appels au sentiment. Ce serait donc mutiler l’enseignement chrétien et diviser la foi que d’inférer de ce que l’un et l’autre doivent aboutir à la pratique et régler l’âme et la vie que l’instruction n’est pas en même temps leur but. Ce serait tendre à mettre les œuvres au-dessus de la foi, et faire pour le christianisme ce que Kant a fait pour la religion naturelle, ne lui décerner d’autorité qu’en vertu de la morale. Cet excès vaudrait mieux, je l’accorde, que l’excès contraire, et le pasteur ferait plus de bien à son troupeau en l’intimidant par la puissance d’un maître qu’en l’appelant à méditer les perfections de l’auteur de tout bien ; mais ce serait une nouveauté dans toutes les églises, et je ne crois pas qu’à la longue la religion gagnât beaucoup à cet aveu sans cesse répété, que, les notions les plus hautes et les plus générales sur lesquelles elle s’appuie étant toutes sujettes à l’accusation d’être contradictoires, elle n’a pour elle que des probabilités, et peut se passer d’autres preuves, parce qu’elle est régulative et non spéculative.

Saint Paul dit en termes exprès : « Nous connaissons en partie, en partie nous prophétisons, et quand le parfait sera venu, le partiel disparaîtra. » C’est-à-dire, en langage moderne, nous avons une part de science, une part de révélation, et ce n’est qu’avec Dieu que cessera cette connaissance imparfaite. Ces mots sont la vérité même. Et il ajoute : « À présent nous ne voyons que par le miroir, nous ne savons qu’énigmatiquement ; » ce qui revient à dire qu’à présent notre connaissance est indirecte et remplie d’obscurités. Ces paroles, en nous avertissant de l’imperfection obligée de notre savoir sur la terre, nous autorisent à déterminer, selon nos forces, notre part de gnose et notre part de prophétie, c’est-à-dire à discerner ce qui est science et ce qui est révélation. Là est le fondement de la distinction entre les deux théologies, et l’on ne peut