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réalité des effets du somnambulisme artificiel, on pouvait encore supposer que leurs expériences n’étaient pas absolument concluantes. La difficulté pour vérifier l’exactitude des faits, c’est que les phénomènes qui appartiennent au système nerveux, évidemment en jeu dans le magnétisme animal, ne se présentent jamais avec une constance et une. régularité qui permettent d’en bien saisir les conditions et la loi. Rien n’est plus mobile et plus capricieux que les affections névropathiques. Ce qui agit aujourd’hui peut n’agir pas demain. La maladie nerveuse est un vrai Protée qui se transforme de minute en minute, et chaque cas d’hystérie, d’hypocondrie, s’offre avec un caractère différent qui se modifie à toute heure. Il en est de même de l’aliénation mentale; les symptômes psychiques en sont extraordinairement multiples et divers. Chaque folie a son genre de délire particulier. La grande objection que l’on adresse au magnétisme animal, et que reproduit M. Mabru dans un livre destiné à le combattre, n’est donc pas concluante. Sans doute, s’il existait, comme l’avancent les magnétiseurs de profession, un fluide magnétique animal auquel se rapportent tous les faits de l’ordre intellectuel et moral, nous devrions retrouver dans sa distribution et son mode d’action la même constance qu’on observe dans l’électricité et le magnétisme terrestre; mais cette théorie chimérique ne saurait soutenir un long examen : c’est, comme l’a montré M. Mabru, un tissu d’extravagances et de contradictions. La question n’est pas là : il s’agit de vérifier des faits physiologiques et pathologiques dont l’irrégularité ne peut éveiller notre scepticisme, puisque les affections dont ils dépendent sont elles-mêmes capricieuses et variables dans leurs symptômes.

Il y a dans le magnétisme animal un premier fait qui s’est trop souvent vérifié pour qu’on en puisse raisonnablement contester la réalité, c’est le sommeil et l’insensibilité. Or nous rencontrons, en dehors des phénomènes provoqués par ses pratiques, des maladies ou des états dans lesquels s’observent des phénomènes tout semblables. Bien que la catalepsie soit une maladie peu commune, on en a étudié aujourd’hui trop de cas pour qu’il y ait du doute sur le caractère qui lui est propre. L’homme est pris d’une sorte de saisissement, il devient subitement immobile et insensible; sa volonté se retire ou cesse de pouvoir commander à ses membres, qui gardent dès lors la position qu’ils avaient au moment de l’invasion du mal, ou dans laquelle on les laisse placés. Si la maladie est très prononcée, on a beau donner aux jambes, aux bras, à la tête, les attitudes les plus forcées, leur imposer les conditions d’équilibre les plus difficiles à conserver, le corps demeure presque indéfiniment dans cette position fatigante. Le cataleptique n’est point en proie à la fièvre;