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qui vainquit François Ier à Pavie, assiégea Clément VII dans Rome, et finit sa tragique destinée les armes à la main, en montant à l’assaut de la ville éternelle.

Charles de Bourbon avait été élevé à la cour de sa tante Anne de France, qui, sous le nom de dame de Beaujeu, avait gouverné si virilement le royaume pendant la minorité de son frère Charles VIII, et avait continué, sans cruauté, la politique habile de son père Louis XI. Cette femme prévoyante avait pourvu avec un soin vigilant à la forte éducation du jeune prince[1], qu’elle savait être l’héritier naturel des Bourbons et dont elle devait plus tard faire son gendre. De bonne heure, Charles de Bourbon était devenu un chevalier accompli et s’était montré homme de guerre aussi distingué que vaillant. A peine âgé de dix-neuf ans, il avait commandé, en 1508, à la bataille d’Aygnadel, les deux cents pensionnaires du roi qui, avec les hommes de leur suite, formaient une troupe de quinze cents à deux mille combattans. A leur tête, il avait exécuté, avec autant de vigueur que d’à-propos, une charge décisive, et il avait contribué au gain de cette célèbre journée, où avait été renversée en quelques heures la puissance que les Vénitiens avaient si lentement acquise dans la Lombardie orientale[2]. Lorsque la défaite de Novare, la perte de l’Italie, l’invasion de la Bourgogne par les Suisses eurent attristé de revers nombreux le règne de l’excellent et inhabile Louis XII, le duc Charles de Bourbon avait été chargé, en 1514, de couvrir la frontière menacée de l’est et de repousser les périls auxquels était exposé le territoire même de la France. Il l’avait fait vite et bien. Il avait mis en état de défense des provinces ouvertes qu’il délivra des soldats débandés, et il avait introduit une rigoureuse discipline parmi des troupes qui, à cette époque, n’en supportaient pas[3].

Investi peu de temps après de l’office de connétable par François Ier, il prit part à la campagne d’Italie qui suivit l’avènement de ce monarque au trône, et pendant les deux jours que dura la rude bataille de Marignan, il commanda en capitaine et combattit en homme d’armes. Reconnu pour l’un des principaux auteurs de

  1. « Bien faisoit-elle nourrir et entretenir le dit comte Charles, lui faisant aprandre le latin à certaines heures du jour, et quelquefois à courir la lance, piquer les chevaux, tirer de l’arc où il étoit enclin ; autres fois aller à la chasse ou à la volerie, et aussi an tous autres déduits et passe-tans où l’on a accoutumé d’induire les grans seigneurs, et à tout le dit comte Charles s’adonnoit très bien, et luy seoit bien de faire tout ce où il se vouloit amployer, et comme à jeune seigneur de bonne nature et de bonne inclination.» Histoire de Bourbon écrite par son secrétaire Marillac, publiée dans Desseins de Professions nobles et publiques, par Antoine de Laval; in-4o, Paris 1613, p. 237 r°.
  2. Histoire de Bourbon, par Marillac, p. 248 V° et 240.
  3. Marillac, p. 257 V° et 258.