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la folie plus d’une fois observée et dont le danger n’est pas un des moindres motifs qui nécessitent la séquestration des aliénés.

Ainsi, lorsque l’intelligence ne peut plus réagir contre les influences qui l’inquiètent et l’agitent, lorsque l’équilibre est rompu entre les passions et la raison, l’homme se dégrade au moral, puis au physique ; la folie paralytique et la démence sont le dernier terme de cette dégénérescence maladive.

Rarement les quatre ordres de causes que je viens de signaler agissent d’une manière isolée ; d’ordinaire elles se réunissent, elles se combinent dans des proportions diverses. Les écarts du régime et l’insalubrité des lieux déterminent une prédisposition maladive, un penchant à la dégénérescence qui participe du caractère physique et congénial. C’est ce qui a lieu pour le crétinisme. La pellagre se confond souvent avec certains genres de folie paralytique, et l’étude des aliénés a fait voir que c’est de préférence chez les individus qui apportent en naissant un germe de maladie nerveuse que les causes morales amènent la folie. Le crétinisme n’est parfois que de l’idiotie, et l’idiotie à son tour est le produit fréquent de maladies qui se développent sous des influences climatologiques et physico-morales. La folie aussi ne semble en bien des cas que le résultat d’une perturbation de l’économie chez des personnes déjà prédisposées à l’aliénation mentale. Certaines maladies aiguës ou chroniques, telles que la pneumonie, la fièvre typhoïde, les fièvres intermittentes, les affections organiques du cœur, entraînent à leur suite, chez des individus d’une constitution intellectuelle délicate, un délire plus ou moins prolongé. En un mot, tous les troubles de l’organisme sont dans une étroite relation, et dès qu’une cause pousse l’homme sur la pente de la dégénérescence, les autres causes agissent pour accélérer sa chute.


II

Ces causes de dégénérescence, qu’on vient de voir réparties en quatre classes, n’interviennent pas toujours d’une manière directe, en altérant notre économie et portant le trouble dans nos fonctions ; les effets qui en résultent se prolongent bien au-delà de la vie des individus, ou, pour parler avec les médecins, ils sont non-seulement actuels, mais encore consécutifs. Le principe de la dégénérescence se transmet héréditairement, et s’aggrave ou s’atténue suivant que ceux qui le reçoivent sont placés dans des conditions propres à en arrêter ou à en développer les effets. De là la possibilité pour notre espèce d’une dégénérescence progressive et continue.

La médecine contemporaine a reconnu que l’hérédité physiologique et pathologique est un fait beaucoup plus général et plus é