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dans lesquels l’expérience l’a confirmé. Il a en effet écrit presque autant de pages sur l’instruction que sur la philosophie même, et dans ces pages nombreuses, où il a jeté quelques-unes des idées qui ont amené la réforme de l’université d’Oxford et d’autres établissemens pédagogiques, il a toujours soutenu que l’instruction, étant une partie essentielle de l’éducation, devait avoir pour but de former des hommes et non des praticiens pour tel ou tel métier, d’éclairer, redresser, mûrir, fortifier l’intelligence au lieu de la plier par des vues étroites, des opinions exclusives, des facultés restreintes, aux conditions d’une dextérité professionnelle. Ses idées étaient les idées de Locke conçues avec plus de fermeté, d’étendue, et soutenues par un fonds de connaissances acquises que Locke avait dédaignées. C’est dans cet esprit qu’il défendit l’instruction classique contre les prétentions des connaissances utilitaires. C’est pour les mêmes motifs qu’il mit au-dessus soit de la théologie, soit des mathématiques, soit des sciences naturelles, l’étude de l’esprit humain comme plus haute et plus générale, la philosophie en un mot, plus propre, selon lui, qu’aucune chose à donner en même temps à l’intelligence la rectitude, la largeur, la pénétration et la vigueur. C’est une thèse qu’il a soutenue envers et contre tous avec la force et l’autorité qu’il portait dans la défense de la vérité. Son caractère était garant qu’appelé à la chaire la plus importante à ses yeux dans la métropole de son pays, il rendrait témoignage de ses convictions et mettrait ses principes en pratique. La tâche, partout difficile, l’était rendue plus encore par les usages et les règlemens de l’université. La règle veut qu’on admette dans la classe de logique les plus jeunes élèves, ceux qui sont encore de francs écoliers, pêle-mêle avec des étudians d’un jugement plus mûr et d’un entendement plus formé. De là une épineuse question : faut-il maintenir l’enseignement au niveau des auditeurs les plus avancés, ou le rabaisser à la. portée des plus novices ? Hamilton n’hésita pas ; on ne peut faire de la philosophie pour des enfans ; l’enseignement n’en peut être que sérieux, solide, élevé même ; fût-il borné aux questions les plus simples, il ne peut éviter de mettre l’esprit aux prises avec des problèmes qui exigent toutes ses forces. Le professeur résolut de ne rabaisser ni mutiler la philosophie, mais de la rendre accessible par la simplicité, l’exactitude, la clarté, l’ordre, en un mot par tout ce qui dépend de l’art de l’enseignement et non de la nature des questions. Son cours resta un cours académique, où pouvaient encore profiter les plus habiles, où les commençans pouvaient avoir accès. Il le rendit aussi élémentaire que possible, il se refusa à le rendre jamais superficiel.

À Edimbourg, l’enseignement de l’université se compose de leçons analogues à celles de nos cours de facultés. Ces leçons méritent