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Cowley le 25 juillet 1859, après avoir reçu communication officielle des préliminaires signés par les deux empereurs, a cela de remarquable qu’elle a posé les bases de la politique inébranlablement suivie jusqu’à présent par le cabinet anglais. Après avoir transcrit les fameux préliminaires, lord John, avec un aplomb qu’on ne saurait trop admirer chez un homme qui n’a pas gagné les batailles de Magenta et de Solferino, écrit la déclaration suivante : « Le gouvernement de sa majesté a examiné avec anxiété ces dispositions, et il est arrivé avec regret à cette conclusion : elles ne répondent point aux intentions annoncées de concert en 1856 par l’empereur des Français et la reine de la Grande-Bretagne. » Ce qui le choque surtout dès lors, c’est le projet de cette confédération italienne dont l’Autriche doit faire partie, et où elle doit infailliblement avoir la majorité des voix et l’influence prépondérante. À quoi bon alléguer que l’Autriche ne figurera dans la confédération que pour la Vénerie ? « L’empereur François-Joseph, dit lord John, ne pourra paraître dans la confédération qu’en qualité de souverain du puissant empire d’Autriche. Sa puissance sera autrichienne, ses moyens seront autrichiens, ses vues seront autrichiennes. Comment un roi de Sardaigne ou de Naples pourrait-Il jamais espérer de lui résister ou de le convaincre ? » Lord John conclut donc que, s’il doit y avoir une confédération italienne, il ne faut pas que l’Autriche en fasse partie, et que le seul moyen de réaliser les vues émises par la Grande-Bretagne et la France aux conférences de 1856, c’est que le territoire italien soit évacué aussitôt que possible par les troupes étrangères, soit françaises, soit autrichiennes. Il ajoute que le royaume de Lombardie lui paraît être insuffisamment protégé sur sa frontière orientale, qu’il serait en outre très désirable que la ville de Rome avec sa banlieue demeurât seule sous le gouvernement direct du pape, et que le reste des états pontificaux passât sous une vice-royauté séculière et laïque.

On voit donc, dans les premiers jugemens portés par lord John Russell, le germe des propositions anglaises qui ont été récemment publiées, et qui semblent destinées à devenir le point de départ de la nouvelle phase où entrent les affaires italiennes. Ces vues, déjà si nettes, s’accusent davantage encore à mesure que la controverse diplomatique s’anime ; elles sont reproduites avec plus de force dans une dépêche du 24 août, adressée par lord John au ministre anglais à Vienne. « Les difficultés diverses qui résultent du traité, écrit le secrétaire d’état britannique, paraissent si graves au gouvernement de sa majesté, que nous ne pouvons comprendre le peu d’attention que paraissent y avoir donnée les gouvernemens des deux puissans empires d’Autriche et de France. Le gouvernement de sa majesté ne comprend pas comment on espère les surmonter. Si l’on abandonnait l’idée d’une confédération italienne, si on laissait l’empereur d’Autriche constituer à sa guise le futur gouvernement de la Vénétie, et en même temps les habitans de l’Italie centrale, libres de toute intervention étrangère, régler leur sort conformé-