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contre Bourbon que c’étaient là les chaussures de brocart qu’il leur avait promises en les conduisant en France.

Tandis que les impériaux précipitaient leur retraite, poursuivis par le maréchal de Montmorency, François Ier s’était rendu à Aix afin d’y reprendre possession de la Provence. Il y parut le 1er octobre en maître irrité. Il y fit décapiter le consul de Prat, qui avait prêté serment de fidélité au duc de Bourbon, et avait accepté de lui la charge de viguier. Après avoir rétabli l’autorité royale dans la capitale de la province recouvrée, avoir transmis à la fidèle et courageuse ville de Marseille les témoignages d’une gratitude qu’il promit d’aller lui exprimer plus tard, il partit pour l’Italie.

L’invasion de la France avait échoué deux fois, la première fois au nord, la deuxième au sud. Heureusement les confédérés l’avaient moins bien exécutée que conçue ; ils avaient été arrêtés par l’insuffisance de leurs moyens d’attaque et leur défaut de concert, tout comme par la vigueur de la résistance qu’ils avaient rencontrée et qu’ils n’avaient pas prévue. En 1523, Paris, couvert par les places de Picardie, n’avait pas eu besoin de se défendre contre eux ; en 1524, Marseille seule avait suffi à les repousser. La France était de nouveau délivrée, et le théâtre de la guerre allait être transporté encore une fois en Lombardie.


II

Au moment où sa situation était des plus dangereuses, où son armée d’Italie avait été détruite, où la plus méridionale des provinces de son royaume était envahie, François Ier avait chargé un camérier de Clément VII, qui traversait la France en revenant d’Espagne, de dire au pape qu’à la tête de trente mille hommes il passerait en personne les Alpes à l’automne. « Si je ne le fais pas, avait-il ajouté, je permets à sa sainteté de ne jamais plus me croire et de ne m’estimer ni comme un roi ni comme un chrétien[1]. » Il put exécuter au mois d’octobre ce projet, qui semblait si chimérique lorsqu’il l’annonçait au mois de juin, et tenter encore une fois la conquête de la Haute-Italie. D’Aix, où il était resté quatre jours, il se dirigea en toute hâte vers les Alpes. Il remonta la vallée de la Durance par Manosque, Sisteron, Chorges, Briançon, impatient de déboucher à Pignerol, dans la plaine de Piémont, où il voulait précéder l’ennemi. En se retrouvant dans ces montagnes qu’il avait traversées au début de son règne pour descendre en Lombardie et gagner la bataille de

  1. C’est ce qu’écrit de Rome l’évêque de Bath au cardinal Wolsey, d’après le récit du camérier Bernardino de la Barba. — Lettre du 12 juillet 1524. — State Papers, t. VI, p. 322.