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Serré de près par ceux qui se disputaient sa capture et cherchaient à s’emparer de ses armes, il était exposé au péril de leur rivalité violente, lorsque le vice-roi de Naples, averti, accourut vers le lieu où il était renversé, descendit de cheval, le dégagea, le releva, et, en s’inclinant devant lui, le reçut prisonnier de l’empereur. Objet d’admiration pour sa bravoure, de respect pour son infortune, François Ier ne fut pas mené dans Pavie, où il aurait paru en captif après avoir compté y entrer en maître. Selon son désir, il fut conduit dans le monastère de Saint-Paul[1], placé au milieu du camp d’où la veille il dominait l’Italie, maintenant perdue. Il devait être transporté de là dans la forteresse de Pizzighitone, sous la garde de deux cents hommes d’armes et de douze cents fantassins espagnols, commandés par le sévère et vigilant capitaine Alarcon.

En moins de deux heures, une belle armée, ayant à sa tête un prince valeureux et les généraux les plus braves, avait été battue et presque anéantie. Plus de dix mille hommes avaient péri sur le champ de bataille ou s’étaient, en fuyant, noyés dans le Tessin, dont Antonio de Leyva, à sa sortie de Pavie, avait envoyé détruire le pont. Les meilleurs chefs de guerre, les grands officiers de la couronne, les premiers seigneurs du royaume, étaient tués ou pris. Le plus ancien des capitaines, La Trémouille, qui avait eu la gloire, comme Bayard, d’être appelé le chevalier sans reproche, avait succombé les armes à la main. Trois maréchaux de France, l’amiral, le grand-maître, le grand-écuyer, étaient parmi les morts ou les prisonniers. Ceux-ci furent nombreux et des plus considérables. Le roi de Navarre, le comte de Saint-Paul de la maison de Vendôme, le seigneur de Fleurange de la maison de La Mark, Federico da Bozzolo de la maison de Gonzague, le prince de Talmont, héritier de La Trémouille, le maréchal Anne de Montmorency et le seigneur Chabot de Brion, qui devaient succéder aux charges, à l’autorité ainsi qu’à la faveur du bâtard de Savoie et de Bonnivet, les seigneurs de Lorges, de La Rochepot, de Montjean, etc., partagèrent la captivité de François Ier. Le premier prince du sang, le duc d’Alençon, beau-frère du roi, y échappa

  1. « Rex autem gallorum ad cœnobium divi Pauli, ubi ante conflictum hospitabatur, sic co rogante fuit comitatus. » Franciscus Tœgius, à la date du 24 février.