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y a entre ces extrêmes la différence de qui a tout à qui n’a rien.

Démontrer qu’il est nécessaire de maintenir l’unité gouvernementale de l’Autriche en la fortifiant par la liberté politique, ce n’est pas prétendre que des libertés provinciales très étendues ne puissent être concédées à ces anciennes divisions territoriales qui ont constitué tant de nationalités distinctes. Le gouvernement, pour établir l’unité, n’a cru pouvoir prendre un meilleur modèle que notre centralisation administrative : il a couvert la surface de l’empire d’un personnel souvent étranger aux mœurs, à la langue même des localités soumises non à une législation, mais à un arbitraire commun. C’était greffer un mal sur un autre. Dans un pays de grandes propriétés, où les anciens seigneurs ont conservé une influence prépondérante, où le pouvoir central peut par conséquent trouver dans chaque partie du territoire des hommes capables d’exercer une action utile et d’administrer pour ainsi dire gratuitement les intérêts locaux, il est nécessaire au point de vue politique, il est utile au point de vue économique de remettre dans de telles mains une délégation de la puissance publique, et d’accorder aux localités une grande indépendance dans le maniement de leurs affaires. Cette liberté provinciale, qui n’est point la fédération, satisferait, dans ce qu’ils ont de légitime, aux besoins des races à qui une nationalité complète ne peut être rendue ; elle n’aurait rien de dangereux pour la tranquillité intérieure et le maintien de l’unité gouvernementale, à la condition d’avoir pour couronnement la liberté politique. En un mot, les franchises provinciales, restreintes dans de justes limites, ne produiraient que d’heureux fruits, si, au-dessus des assemblées locales appelées à délibérer sur certains intérêts propres, une représentation générale était armée du droit de veiller aux intérêts de tout l’empire. Telle est pour nous la solution nécessaire de cette question de l’organisation intérieure de l’Autriche qui soulève de si vives anxiétés. Nous ne sommes à cet égard que l’écho des esprits sérieux, des hommes les plus sincèrement attachés à la monarchie autrichienne, de tous ces conservateurs libéraux désireux d’améliorations pratiques, dont l’auteur d’un travail déjà cité avait exposé ici même les griefs et les espérances.

Mais si de graves motifs d’ordre et de progrès rendent désirable le changement d’un régime intérieur dont toutes les modifications de détail introduites coup sur coup depuis quelques mois ont révélé les vices sans les corriger radicalement, la situation financière seule exige impérieusement qu’on procède sans plus de retard à une réforme complète. Peu de mots suffiront pour le démontrer.

La dette autrichienne s’élève en capital à 6,512,000,000 de fr., et la part de cette dette afférente au Piémont, par suite de la cession