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Wildspitze. En d’autres circonstances, les nuages affectent des teintes diaprées et changeantes ou présentent des oppositions de tons qui se réfléchissent sur le sol. Tandis que les parties éclairées affectent une teinte bleu verdâtre, les ombres se colorent en brun roux. Si haut que soit le soleil au-dessus de l’horizon, la présence des vapeurs fait que les ombres sont encore accusées, et au sommet du Mont-Blanc ou du Mont-Rose, on peut en plein midi apercevoir les ombres des aiguilles montagneuses qui se projettent sur la neige. C’est que dans ces atmosphères froides les brouillards arrivent à un degré de condensation qui engendre des gouttelettes épaisses, qu’un refroidissement subit peut transformer en de petits cristaux de glace à travers lesquels les rayons solaires se réfractent de manière à donner naissance aux apparences colorées les plus diverses. Ce sont des causes de cet ordre qui produisent les anneaux colorés observés parfois à l’entour du soleil, et qu’on appelle des couronnes et des halos. Et ce n’est pas seulement à la lumière réfractée que sont dues ces nombreuses apparences : le soleil se réfléchit aussi dans les cristaux de glace flottante que l’atmosphère tient en suspension. Dans un voyage aérostatique accompli le 27 juillet 1850, MM. Barral et Bixio ont vu le soleil se réfléchir au-dessous d’eux sur l’atmosphère vaporeuse, comme il l’aurait fait à la surface des eaux.

Un physicien français qui a fait l’ascension du Mont-Blanc, M. Bravais, a observé qu’aux grandes altitudes certaines teintes crépusculaires sont beaucoup plus visibles ; on aperçoit souvent après le coucher du soleil, à la suite du crépuscule, une teinte rose bien tranchée qui reste inaperçue pour la plaine et illumine le ciel à l’occident, vers le tiers de sa hauteur. Par contre, l’illumination au zénith est moins marquée dans ces hautes régions. À l’ombre, on a de la difficulté à distinguer des divisions de quelque finesse. La lune éclaire faiblement le firmament, et quand elle est dans son plein, c’est à peine si son éclat fait disparaître les étoiles de sixième grandeur dans la région du ciel opposée à l’astre.

Si les phénomènes lumineux du matin et du soir prennent dans les régions élevées un caractère de grandeur et de variété qui leur donne un attrait particulier, les phénomènes astronomiques s’y montrent aussi avec infiniment plus d’éclat. Le 8 juillet 1842, MM. Agassiz et Desor observèrent au sommet du Grimsel une éclipse de soleil. Jusqu’au milieu du phénomène, aucun changement optique particulier ne s’était produit ; mais quand l’éclipse eut envahi les trois quarts du disque solaire, le phénomène le plus imposant se produisit. La teinte des glaciers et de la mer de glace à l’opposite du soleil pâlit insensiblement ; cette pâleur croissait avec l’é-