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LA
COMEDIE ANGLAISE
SOUS LA RESTAURATION

I.
LE PUBLIC.

I

Lorsqu’on quitte les nobles portraits de Van-Dyck pour les figures de Lely, la chute est subite et profonde : on sortait d’un palais, on tombe dans un mauvais lieu.

Au lieu de ces seigneurs fiers et calmes qui restent cavaliers en devenant hommes de cour, de ces grandes dames si simples qui semblent à la fois princesses et jeunes filles, de ce monde généreux et héroïque, élégant et orné, où resplendit encore la flamme de la renaissance, où reluit déjà la politesse de l’âge moderne, on rencontre des courtisanes dangereuses ou provocantes, à l’air ignoble ou dur, incapables de pudeur ni de pitié[1]. Leurs mains potelées, épanouies, ploient mignardement des doigts à fossettes. Des torsades de cheveux lourds roulent sur leurs épaules charnues, les yeux noyés clignent voluptueusement, un fade sourire joue sur les lèvres sensuelles. L’une relève un flot de cheveux dénoués qui coule sur les rondeurs de sa chair rose ; celle-ci, languissante, se laisse aller, ouvrant une manche dont la molle profondeur découvre toute la blancheur de son bras. Presque toutes sont en chemise ; plusieurs

  1. Voyez surtout les portraits de lady Mooreland, de lady Williams, de la comtesse d’Ossory, de la duchesse de Cleveland, de lady Price, etc.