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LA
NOUVELLE-GRENADE
PAYSAGES DE LA NATURE TROPICALE

IV.
LES ARUAQUES ET LA SIERRA-NEVADA.



I

Habitant la Nouvelle-Grenade depuis plus d’une année, je connaissais les mœurs des indigènes, les ressources agricoles du territoire ; j’avais formé de nombreuses et agréables relations, et je pouvais compter sur la sympathie de mes nouveaux concitoyens comme si j’eusse été moi-même un Riohachère[1]. Aussi le moment me sembla-t-il venu de réaliser mes plans dans quelque vallée de la Sierra-Nevada. Don Jaime Chastaing, cet ouvrier français — toujours, on s’en souvient peut-être, à la recherche d’un Eldorado, était de plus en plus mécontent de son sort ; il me pria de l’accepter pour associé, et j’eus la faiblesse de lui donner mon consentement. Je pensais naïvement qu’il avait enfin découvert sa vocation à l’âge avancé de soixante-dix ans, et que toute son activité dormante s’était sérieusement réveillée. Je n’oubliais pas non plus que j’allais vivre au milieu des Indiens aruaques, loin de toute société

  1. Voyez sur Rio-Hacha et ses habitans la Revue du 15 mars ; voyez aussi les autres parties de cette série dans la Revue du 1er décembre 1859 et du 1er février 1860.