Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 27.djvu/955

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

c’est M. J. J. van Oosterzee, pasteur à Rotterdam. M. van Oosterzee s’attache surtout à défendre le supernaturalisme, miné par le courant de la théologie moderne. Il aime le miracle et l’autorité infaillible de l’Écriture. L’émancipation complète de la conscience individuelle l’épouvante, et il désire rester attaché, sinon à la lettre, du moins aux principes fondamentaux de la vieille confession de foi. Les adversaires théologiques de M. van Osterzee lui reprochent de manquer, non pas de savoir, mais d’esprit scientifique, de se laisser entraîner, même dans ses ouvrages didactiques, par les sentimens de son cœur pieux, par les rêves de sa belle imagination, et de sacrifier, souvent et sans le vouloir, les résultats d’une critique impartiale aux séductions du lyrisme oratoire. Ils pensent que, nulle autorité officielle n’ayant fixé anciennement ce qu’il faut entendre par les points fondamentaux de la doctrine réformée, il n’appartient à personne de les déterminer de son chef sans accorder par là aux autres le droit d’en faire autant, et de déplacer, s’ils le croient nécessaire, les limites posées dans un premier essai.

Là du reste est le côté faible de l’orthodoxie en Hollande. Forte encore du nombre et du zèle de ses adhérens, elle voit la science religieuse se tourner de plus en plus contre elle. La critique allemande coule désormais à pleins bords dans un domaine qui lui était resté longtemps à peu près fermé. L’histoire des dogmes, l’interprétation purement historique de la Bible, par-dessus tout les impérieux besoins des intelligences formées aux meilleures sources de la philosophie et des sciences contemporaines réclament à grands cris une transformation de l’enseignement religieux.

Déjà, du temps de van der Palm, le professeur van Voorst avait recommandé aux étudians les travaux des théologiens allemands. Un autre professeur hollandais, van Heusde, avait presque ressuscité le platonisme, tant ses leçons respiraient d’enthousiasme pour le système du grand génie athénien. Ce n’étaient là sans doute que des irrigations imperceptibles dans un sol encore peu pénétrable ; pourtant elles le préparèrent. À mesure que les questions théologiques se posèrent, le goût de la philosophie se réveilla, comme il en a toujours été dans l’histoire de ces deux sœurs, qui se brouillent si souvent et ne savent point se passer l’une de l’autre. Bientôt ce mouvement se prononça mieux. On vit se produire une psychologie spiritualiste fort remarquable de M. Roorda, fondée sur l’observation et en pleine réaction contre ce dualisme tranché du corps et de l’âme, dans lequel l’ancien spiritualisme s’était si malheureusement embarrassé. Aujourd’hui, si quelque chose prouve que la philosophie est à l’état de renaissance dans la patrie de Spinoza, c’est l’influence acquise par les idées de M. Opzoomer, professeur en philosophie à Utrecht. Ce