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racines et radicelles d’une seule souche les composés salins, ou minéraux et organiques, qui se répartissent entre les tissus ; ceux-ci n’en retiennent que la moindre part, encore la plus faible portion seulement passe-t-elle dans le jus : ce n’est donc que cette dernière portion qui se trouve exportée hors du domaine avec le vin livré au commerce. Cette minime quantité se trouve largement compensée par les produits de la désagrégation des fragmens de roches et de matières terreuses que l’action incessante des radicelles a fait dissoudre, en même temps que les organes foliacés absorbaient les combinaisons de carbone et d’azote répandues dans l’air, et les engageaient dans les formations organiques de la plante. Ce sont les phénomènes de cet ordre qui fertilisent par degrés les terres en culture, en augmentant d’année en année les proportions des substances terreuses rendues assimilables et des composés organiques empruntés à l’atmosphère, sous la condition, bien entendu, que la plus grande partie des résidus de la récolte restera sur le terrain[1].

Toutefois, il faut le reconnaître, un tel enrichissement de la superficie ne peut s’obtenir qu’aux dépens du fonds, et, dans tous les cas, quelque peu épuisante que soit une culture, l’entretien indéfini de la fécondité du sol exige impérieusement que l’on rende par des engrais appropriés ce que les produits vendables des récoltes ont enlevé. Il faut encore qu’on ait le soin de rendre à la terre tous les résidus de la taille, de l’ébourgeonnage, de la pression des vendanges, et jusqu’aux premières lies des vins soutirés. Même dans ces conditions favorables, la déperdition du sol n’en serait pas moins

  1. On supposait autrefois et cette opinion subsiste chez quelques viticulteurs que toujours et pour tous les terrains les fumures étaient nuisibles dans les vignobles. La célèbre ordonnance de Philippe le Hardi prouve qu’en 1395 la prohibition absolue des fumures et l’exclusion des plants de gamay semblaient les seuls moyens de rendre aux vignobles de la Bourgogne leur antique renommée et à ses vins leur vertu bienfaisante.