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italienne. On dit les nouveaux ministres du roi de Naples animés de bonnes dispositions ; le caractère du ministre des affaires étrangères surtout, M. de Martino, est fait pour inspirer une sérieuse confiance. Que ce cabinet réussisse à créer un parti constitutionnel, et la marche précipitée et périlleuse de la révolution italienne pourra être régularisée et modérée.

L’Orient est venu ajouter d’autres soucis aux anxiétés que cause la question italienne ; mais le danger en Orient n’est point précisément du côté où de déplorables événemens ont surtout appelé l’attention publique. La situation anarchique de la montagne de Syrie, les horribles cruautés exercées par les Druses contre les Maronites ont soulevé en Europe un immense cri d’indignation. Il y a là une question d’humanité qui ne laisse place à aucune dissidence politique, à aucune rivalité d’influence entre les grandes puissances qui sont obligées de surveiller sans cesse la Turquie, mais dont la vigilance est si souvent et si malheureusement trompée. Il faut mettre un terme aux boucheries qui ont ensanglanté le Liban, il faut protéger les populations chrétiennes contre le retour de pareilles calamités. Les grandes puissances ont pourvu au premier point en envoyant des vaisseaux de guerre devant Beyrouth. La Porte elle-même s’est hâtée d’expédier sur les lieux son ministre des affaires étrangères, Fuad-Pacha, appuyé de troupes nombreuses. Les cabinets seront d’accord sans doute sur les garanties qu’il faudra chercher pour assurer à l’avenir le bon gouvernement de la montagne de Syrie. Il faut espérer que la triste expérience qui vient de s’accomplir les empêchera de retomber dans des erreurs aussi fatales que celles qu’ils ont commises autrefois en réglant cette difficile question. La responsabilité de la Forte est en effet moins engagée qu’on ne le suppose généralement dans les désordres anarchiques dont la Syrie vient d’être le théâtre. On croit dans le public que les Druses et les Maronites sont sous l’administration directe de la Porte, et on a fait remonter au mauvais gouvernement du sultan la responsabilité des crimes commis. Les Turcs ne sont pas en cette circonstance aussi coupables qu’on le pense. Avant 1840, les populations du Liban, les Druses comme les Maronites, étaient placées sous une administration unique, celle de l’émir Beschir. Cette unité de pouvoir maintenait une paix relative entre ces peuplades ennemies. Après les événemens de 1840, lorsque la Syrie eut été enlevée à la domination énergique de Méhémet-Ali, le vieil émir Beschir, qui avait si longtemps commandé dans le Liban, étant mort, et son autorité n’ayant pu être conservée dans la famille des émirs, les grandes puissances s’occupèrent de constituer une administration spéciale pour les populations de la montagne. Les diplomates qui se chargèrent de régler la question adoptèrent une combinaison logique en apparence, mais viciée par l’ignorance où ils étaient touchant le caractère des hommes et des lieux. Ils crurent assurer la paix entre les Maronites et les Druses en assignant à chacune des deux races et des deux religions une administration distincte et séparée. Malheureusement les auteurs de