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e, tout aussi invraisemblable. Le savant danois n’a pas fait preuve de plus de critique dans les témoignages qu’il a prétendu emprunter à la tradition, et il s’efforce vainement de retrouver en Égypte des mythes rappelant les différentes phases de son roman géologique, de ressusciter la vieille fable de l’Atlantide, sur la réalité de laquelle on n’est pas plus édifié que sur celle d’Her l’Arménien. Le livre de M. Klee a été traduit en français, après l’avoir été en allemand ; il annonce des connaissances fort étendues, mais plus d’imagination que de jugement. Telle est l’opinion de la majorité des hommes compétens à son endroit. L’observation a d’ailleurs constaté que le choc des comètes ne saurait avoir aucun des effets considérables que lui supposent MM. de Boucheporn et Klee. La comète qui en 1767 et 1768 traversa le système des satellites de Jupiter ne produisit pas la moindre perturbation dans les mouvemens bien connus de ces petits corps.

Le choc d’une comète doit donc être abandonné comme une hypothèse gratuite, et si d’ailleurs il pouvait rendre compte des révolutions primitives, comment expliquerait-il ce que la tradition dépeint comme ayant eu le caractère d’une longue et violente inondation ? C’est M. de Boucheporn lui-même qui s’est chargé de soulever l’objection. « Le déluge universel, écrit-il, peut-il être en réalité considéré comme un effet du choc ? La difficulté de cette question n’est pas dans le déplacement des eaux ; ce déplacement est la plus claire des conséquences, et il doit y en avoir eu réellement deux, l’un éphémère, dû à la vitesse acquise de ce mobile dans le changement brusque de rapidité ; l’autre permanent, résultat de la variation de courbure s’il y a déplacement de l’équateur. Mais la difficulté principale porte ici sur le point de savoir comment aucun être humain, aucun animal terrestre (et ajoutons en passant l’arche du bon Noé), auraient pu résister à la secousse qu’une semblable rencontre devait produire, car la brusque augmentation ou diminution de la vitesse dans la partie solide du globe aurait dû lancer comme des projectiles tous les corps mobiles qu’il supportait. »

Dans les deux systèmes de Boucheporn et de Klee, on voit que c’est à un déplacement des axes que l’on rapporte les révolutions terrestres. Si l’axe terrestre ne change pas sensiblement, il n’en est pas de même de l’inclinaison de cet axe par rapport à l’écliptique[1] ; mais

  1. On sait que l’écliptique est la courbe elliptique que le soleil parait décrire en une année, et que la terre décrit réellement dans cette même période. L’écliptique est inclinée obliquement Bur l’équateur qu’elle coupe en deux points diamétralement opposés appelés équinoxes. On nomme solstices les deux points de l’écliptique les plus éloignés de l’équateur.