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que lui donne M. Le Hon ; le même savant en retrouve le lit dans des sables de la Flandre, les landes de la Gascogne, les alluvions de la Bresse ; le terrain pampéen de l’Amérique du Sud nous indiquerait aussi le passage des eaux qui vinrent inonder notre continent.

Dans cet exposé, le géologiste belge dérange un peu les divisions qu’on a récemment établies pour la faune quaternaire[1] ; mais il faut convenir que l’hypothèse qu’il soutient cadre assez bien avec la distinction de deux périodes, l’une chaude et l’autre glaciale, pendant ce dernier âge géologique. Toutefois on doit se demander pourquoi, après le dernier déluge, lorsque notre hémisphère commença à se réchauffer, les animaux des contrées tropicales, qui avaient émigré vers le sud au retour de la période froide, ne sont pas revenus, pourquoi on n’a point vu reparaître dans la zone tempérée la flore tropicale qui s’y était développée bien avant le cataclysme. Il semble alors difficile de se rendre compte de ces phénomènes sans admettre une diminution de l’action du foyer central. Les lignes isothermes ne se retrouvant plus dans le passé géologique ce qu’elles ont été depuis les temps historiques, comment n’attribuer les alternances de température qu’à la fonte et à l’accumulation successives des glaces des deux pôles ?

À en juger d’ailleurs par les fossiles qu’elle présente, la période quaternaire annonce plus la prédominance des eaux douces que celle des eaux marines. Aussi bien des géologistes ne veulent reconnaître dans le diluvium que les effets d’inondations partielles dues au gonflement des grands fleuves, à l’abondance des pluies ou à la rupture fréquente des digues des étangs et des lacs. M. Marcel de Serres lui-même, qui a dans la Bible une foi si aveugle qu’il y retrouve en germe toutes les découvertes modernes, et qui ne se montre pas difficile sur l’art de plier le texte hébreu aux exigences des idées nouvelles, ne voit rien de commun entre les dépôts diluviens et le déluge de Noé. M. Le Hon s’explique l’absence des animaux marins en admettant que les mollusques apportés de l’Océan n’ont pas vécu dans ces mers improvisées, tant à raison de la nature limoneuse des ondes que de l’abondance des glaçons, ou parce qu’ils ont été balayés par les courans. Le célèbre dépôt dit limon hesbayen, le loess du Rhin, n’offrent aucune trace d’animaux marins. D’après M. Le Hon, ces limons ont été progressivement déposés par les glaces au moment de la fonte ; ils sont le dernier effet du déluge qui précéda celui de Noé et datent de quatorze mille cinq cents ans. Ces réponses

  1. Voyez sur les idées de M. Lartet mon étude sur la Géographie des Animaux, Revue du {{1er novembre 1859.