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Romagne ? La diplomatie est encore muette à ce sujet, et plus d’une grave question se cache sous les réserves qu’elle garde. Qu’il nous soit permis de devancer les cabinets européens dans la solution de cette difficulté grammaticale, et d’étudier sous une de ses faces spéciales, c’est-à-dire dans sa situation financière, le royaume de la Haute-Italie !

Dans l’état provisoire où se présentent les provinces unies sous l’autorité du roi Victor-Emmanuel, il semble que la question de l’indépendance domine et résume toutes les autres. Pour la plupart du moins, l’indépendance complète, l’affranchissement du joug étranger, des Alpes jusqu’à l’Adriatique, voilà ce qu’il faut obtenir d’abord et à tout prix. L’autonomie de la Toscane, le trône des Bourbons de Naples, la couronne temporelle du pape, les traditions municipales, l’esprit monarchique, les bases sur lesquelles repose l’église universelle, tout semble oublié, méconnu, sacrifié même à cette soif ardente de réhabilitation nationale qui pousse l’Italie à s’agréger et à se montrer unie aux yeux de l’Europe, mal édifiée encore sur l’issue de l’entreprise. En face de telles perspectives, de simples rapprochemens de chiffres courent sans doute le risque d’offrir un intérêt bien secondaire ; la modeste étude d’un budget peut n’éveiller qu’une curiosité aisément distraite. Il y a plus ; ne s’expose-t-on point, en faisant ressortir les charges que la guerre de l’indépendance impose aux populations italiennes, à fournir matière à de vils calculs et à faire estimer le prix comme inférieur aux sacrifices qu’il réclame ? Telle n’est point assurément notre pensée ; tel ne sera pas, nous l’espérons, le résultat de cet exposé. Il y a toujours une leçon morale à tirer du bilan des recettes et des dépenses de chaque gouvernement, et l’économie est bonne à recommander même dans les entreprises les plus glorieuses ou les plus fécondes. En second lieu, puisque la victoire appartient en définitive plus encore aux gros budgets qu’aux gros bataillons, on peut, dans la prévision d’une lutte prochaine, déterminer de quel côté penchera la balance en comparant les ressources financières des deux pays engagés dans le débat. Déjà la situation intérieure de l’Autriche a été l’objet dans la Revue d’une impartiale analyse[1] : n’est-il point à propos de devancer les complications ultérieures, complications peut-être inévitables, et d’exposer aujourd’hui l’état financier du royaume de la Haute-Italie ?

En 1857, une étude où l’on se proposait de mettre en regard des visées ambitieuses de la politique piémontaise les ressources financières du pays se terminait par ces considérations[2] : « Par combien

  1. Voyez la Revue du {{1er mars 1860.
  2. Voyez la Revue du 15 octobre 1857, le Piémont, ses Finances, ses Chemins de fer.