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obéi aux lois d’un même gouvernement, ainsi que c’était le cas il y a vingt ans encore, du temps de l’émir Beschir, qui a régné pendant de longues années sur le Liban maronite et druse.

Au point de vue religieux, les Druses peuvent être considérés comme une espèce de société secrète dont on n’a pas encore pénétré les mystères, mais qui n’a ni l’esprit de prosélytisme, ni l’esprit d’intolérance. Avec les musulmans, ils affectent les dehors de l’islam ; avec les chrétiens, il professent volontiers un grand respect pour le culte de la Vierge, mais ils ne font jamais d’efforts pour amener les uns ou les autres à leur croyance. Au contraire ils se montrent toujours très soigneux d’éviter de donner aucune prise qui pourrait mettre sur la trace de leurs doctrines l’esprit investigateur des étrangers. D’ailleurs, si même ils consentaient à vouloir bien éclairer les profanes, la plupart des Druses ne pourraient sans doute pas réussir à le faire. Une hiérarchie très rigoureusement établie partage toute la nation en groupes d’acals ou d’initiés dont un très petit nombre seulement connaît les principes essentiels de la foi. On sait cependant que les Druses sont idolâtres et qu’ils adorent la Divinité sous la forme d’un veau ; mais jusqu’ici ils ont réussi à dérober la connaissance de presque tous leurs livres religieux aux recherches des Européens. Ceux que le gouvernement égyptien a pu se procurer du temps de Méhémet-Ali ne jettent, à ce qu’il paraît, qu’une lumière très imparfaite sur les croyances des Druses. On s’accorde à les regarder comme la population la plus guerrière et la plus énergique de la Syrie.

Je ne ferai que nommer les Nosaïris ou Ansariès, autres idolâtres qui habitent au nord des Maronites, au-delà de Tripoli, et dont les croyances sont aussi très peu connues. Il faut en dire autant des Ismaélites, qui sont accusés de se livrer, dans la célébration de leurs mystères, à des pratiques infâmes, autant encore des Quedamécés, qui adorent les couleuvres noires, autant de quelques autres idolâtres que l’on trouve en Syrie, restes encore vivans de toutes les erreurs humaines. Entre ceux-ci cependant il faut noter à part les Yezidis, race assez puissante sur les bords de l’Euphrate, et qui a poussé une de ses branches en Syrie. L’histoire des Yezidis est inconnue tout aussi bien que leur doctrine. Les musulmans disent qu’ils adorent le diable, ou, si on l’aime mieux, le principe du mal. Ce qui paraît certain, c’est qu’ils sont divisés eux-mêmes en plusieurs sectes, et que l’une d’elles, dont l’existence est mystérieuse, porterait le nom de hatkelis ou égorgeurs. Ils ressembleraient par quelques points aux thugs de l’Inde. Les Yezidis portent aux musulmans une haine profonde qui se traduit par l’assassinat toutes les fois qu’il peut être commis impunément. Il est naturel qu’en retour les musulmans de