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supérieur qui, par une loi récente, a été l’objet d’une insignifiante augmentation. On ne saurait trop répéter que cette situation est pleine de périls. Nous aurons en 1867150 bâtimens de combat ; nous n’aurons pas assez d’officiers pour les monter, si l’on persiste dans ces cadres immuables depuis un demi-siècle. Tout le monde en souffre, l’état dans son service, l’officier dans son avancement. Le zèle doit s’en ressentir et la tiédeur gagner jusqu’aux meilleurs quand ils voient avec les années leur horizon se limiter et leurs chances se restreindre. Aussi plus d’une démission est-elle donnée avant l’heure, et l’émigration est-elle grande vers les services privés. Pour arrêter ce mouvement et donner plus de jeu aux cadres, le gouvernement vient de prendre deux mesures à titre de palliatif : il a créé pour les officiers de marine un nouvel état, qui est celui de la résidence fixe, où, en retour de quelques, avantages, ils renoncent à leur droit à l’avancement. La même mesure atteint les officiers qui, après un congé de trois ans, resteront de leur plein gré dans les services privés. Pour compléter cette élagation, il eût fallu aller plus loin et toucher au chapitre délicat des pensions de retraite. Il y a, dans les cadres, des officiers qui n’y restent qu’à leur corps défendant et avec le dégoût du service, des infirmes, des hommes mariés qui dans la vie de ménage puisent la répugnance de la vie de bord, des mécontens qui se disent sacrifiés, des insubordonnés que les capitaines éloignent à l’envi et dont ils se débarrassent au premier prétexte, toute une catégorie enfin qui semble prendre racine à terre et va le moins qu’elle peut à la mer. Cette catégorie obstrue plus qu’elle ne sert, et sans profit pour elle-même nuit aux véritables vocations ; elle se ferait justice de ses mains si elle ne reculait devant l’insuffisance de la pension de retraite. Ne serait-il pas possible, au moyen d’une retenue plus forte, 5 pour 100 par exemple au lieu de 3 pour 100, d’élever cette pension de manière à faciliter les sorties volontaires, à déblayer le terrain, à augmenter les chances des officiers méritans et persévérans ? C’est un calcul à faire et peut-être une épreuve à tenter.

Même avec ces tempéramens, les chiffres des cadres devraient être augmentés ; ils sont à peine au niveau des nécessités courantes, et bien au-dessous des éventualités qu’il est toujours prudent de prévoir. On dit que l’augmentation ne serait qu’une satisfaction passagère, et qu’en portant dans les sommets des cadres des hommes plus jeunes, on reproduirait avec une intensité plus grande les mécomptes et les plaintes du cadre inférieur. On ajoute qu’à l’accroissement du nombre des titulaires devrait correspondre un développement dans le service, sous peine de créer des grades sans fonctions. De là des dépenses dans lesquelles le bon ordre de nos finances ne