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filaires, etc., quelles transformations paraissent prouvées, quelles autres sont incertaines ; mais ce serait sortir des bornes de cette étude, et il suffit d’avoir indiqué quelles armes peut tirer l’hétérogénie de l’étude de ces êtres singuliers, en faisant pressentir toutefois que ces armes ne sont pas invincibles. Si, dans un seul cas, ces transformations, ces migrations d’un individu dans un autre sont vues d’une manière incontestable, l’hypothèse de la génération spontanée est bien ébranlée. Cette hypothèse en effet doit être, même pour ses partisans les plus exclusifs, un refuge contre l’impossibilité de toute autre explication ; mais elle ne peut être adoptée à priori comme l’explication naturelle du phénomène de la vie et du développement des animaux. C’est une opinion qui ne peut se soutenir que par des preuves négatives, et la moindre preuve positive la mine jusque dans ses fondemens qui paraissaient les plus solides.


IV.

Les expériences et les conclusions de M. Pouchet ont été portées par lui devant l’Académie des Sciences dans de nombreux mémoires qui ont été remarqués, mais qui ont été combattus avec une grande vivacité. Tous ceux des membres de l’Académie que leurs études rattachent à l’histoire naturelle et à la physiologie ont protesté contre la doctrine de Burdach, renouvelée par le professeur de Rouen. M. Milne Edwards, M. de Quatrefages, M. Dumas, M. Bernard lui-même ont exposé dans des notes précises et courtes les meilleures raisons de ne pas croire à la génération spontanée, et ont assuré que leur conviction n’était nullement ébranlée par ces faits nouveaux.

D’où vient cela, et que peut-on objecter à ces expériences exactes et nombreuses, à ces conclusions très peu absolues, puisque l’ouvrage ne traite que des microzoaires ? Comment les savans mêmes amis des nouveautés, ceux qui aiment et professent l’esprit de la science moderne, n’ont-ils nulle bienveillance pour la théorie de M. Pouchet ? N’ont-ils donc pu y trouver ce caractère de vérité qui frappe dans bien des découvertes récentes, cette logique si remarquable des faits et des opinions ? A une conclusion très absolue et très précise succède d’abord une théorie également précise et absolue, mais en sens inverse. Puis la théorie délicate des modernes enseigne que la vérité est également loin des extrêmes, et que, tandis que tous les animaux ne naissent pas sans germes, comme l’ont cru quelques-uns, tous ne sont pas le produit d’ovules fécondés, comme d’autres l’ont pensé, mais ils sont tantôt dans un cas, tantôt dans l’autre,