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sière et traversé par un courant d’air rapide. Cet air pourtant et cette poussière contiennent des ovules : M. de Quatrefages les a observés, et ce qu’il voit est bien vu, ce qu’il pense sagement pensé ; mais sans doute leur nombre est petit et ne suffit pas pour tout expliquer, puisque la quantité d’animaux n’est pas en rapport avec le volume de l’air. Pourquoi ne se développeraient-ils pas, s’il y en avait tant ? Pourquoi dans un air confiné, et qui semble pur, tant d’êtres apparaîtraient-ils ? Que la multiplication de ces animaux soit fort rapide, comme l’a pensé M. Ehrenberg, que la reproduction des helminthes s’explique en partie par ces phénomènes que l’on réunit sous le nom de généagenèse, que certains rotateurs puissent se quadrupler en vingt-quatre heures, d’où résulte en dix jours un million d’individus, cela est certain ; mais les faibles différences de taille et de grosseur entre les infusoires d’une même liqueur, leur apparition constante au même degré de développement, rendent ces inductions difficiles à admettre pour tous les cas, bien qu’elles n’aient rien d’absolument invraisemblable.

Un chimiste distingué, M. Pasteur, a voulu prêter l’appui de quelques expériences aux objections des membres de l’Académie des Sciences[1], mais jusqu’ici l’avantage reste encore à M. Pouchet. Son adversaire a vu que dans les caves de l’Observatoire les infusoires naissent moins nombreux que dans la cour, mais il n’est pas difficile de savoir que l’obscurité est moins favorable à leur développement que le soleil. Il n’est pas probable que dans l’un de ces deux endroits l’air contienne plus ou moins de germes. Il a vu qu’une goutte de mercure change la nature et le nombre des êtres nés dans une infusion, et il en conclut que ce métal a apporté de nouveaux germes, ou bien a influé sur ceux qui nageaient déjà dans le liquide, ce qui est peu vraisemblable, tandis que M. Pouchet pourrait tirer de là quelques raisons favorables à la doctrine de l’hétérogénie.

La plupart des animaux se reproduisent par des germes dont l’existence est merveilleuse sans doute, mais certaine ; quelle nécessité d’admettre un autre mode de reproduction plus merveilleux encore, et que l’on n’a pu prendre sur le fait ? Voilà l’objection véritable. La ressemblance des animaux de même genre et la persistance des espèces paraissent prouver aussi que chaque individu doit être produit dans des circonstances bien déterminées, dans des milieux bien précis, et engendré nécessairement par l’animal auquel il doit ressembler. La confusion entre tous les animaux et toutes les plantes serait grande si toute matière, toute combinaison pouvait produire spontanément les êtres qui sont composés des mêmes élémens.

  1. Séance du 5 septembre 1860.