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comme les pampres qui grimpent aux arbres dans les campagnes italiennes, et, en s’enroulant autour des plus qui la soutiennent, elle forme des thyrses gigantesques à la taille des divinités énormes créées par les mythes Scandinaves ; mais, au lieu d’être comme « la mère du vin » un produit presque spontané du sol, elle ne livre ses cônes parfumés, qui communiquent à la bière leur amertume conservatrice, qu’au prix de très grandes avances et d’un labeur continuel. Il faut d’abord appliquer à la terre une fumure considérable, puis la garnir de perches de sapin à raison de 3,000 par hectare au prix de 35 à 50 fr. Le cent. Quand la plante grimpante commence à jeter autour des tuteurs ses tiges volubiles, il faut les y fixer au moyen de liens, et, aussitôt que ses feuilles jaunissent, l’arroser des engrais liquides les plus stimulans, enfin, lorsqu’arrive le moment de la récolte, appeler de toutes parts des ouvriers pour opérer la cueillette. La description que M. Esquiros a faite des vendanges du Kent et du Sussex s’applique de tout point à celles des cantons de Poperinghe et d’Alost[1]. Seulement, tandis qu’en Angleterre, suivant M. Caird, les autres cultures sont sacrifiées au houblon, qui absorbe tout le fumier dont les cultivateurs disposent, il n’en est pas de même en Flandre, où l’on ne voit nulle part de plus belles récoltes de froment et de betteraves qu’à côté des houblonnières. Cette différence provient de ce que le cultivateur flamand, habitué à faire plus de sacrifices que le cultivateur anglais, achète la plus grande partie de l’engrais supplémentaire dont il a besoin. On estime le produit du houblon sec à l’are de 12 à 15 kilos, et les frais pour la même étendue de 6 à 7 francs ; mais il n’est point de récolte dont le rendement et la valeur soient plus irréguliers.

De même que le houblon remplace ici la vigne, ainsi la chicorée tient lieu de café, et la betterave de canne à sucre. On sème la chicorée, parce qu’elle sert à préparer la boisson journalière des ouvriers, et qu’on en expédie une quantité assez notable en Angleterre après lui avoir fait subir les préparations nécessaires. C’est également une culture très dispendieuse, mais qui donne un riche produit, estimé de 800 à 1, 000 francs l’hectare. La betterave à sucre n’est guère cultivée que dans la lisière méridionale, et elle y donne le même rendement que dans le département du Nord, 35 ou 40, 000 kil. à l’hectare. Les plantes oléagineuses occupent plus de place, parce qu’elles prospèrent dans les terres légères. C’est encore une récolte excellente ; outre l’huile, elle donne le tourteau, si précieux pour nourrir le bétail et pour engraisser la terre. Le produit du colza est en moyenne de 22 hectolitres à l’hectare, d’une

  1. Voyez la Revue du 15 novembre 1858.