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imprévue pourrait bien changer nos préoccupations extérieures et nous ménager quelque surprise heureuse ; c’était la solution à laquelle nous nous attendions, quand nous prenions, il y a quinze jours, la liberté d’interpeller M. de Persigny à propos de son discours au banquet du lord-maire, de lui dire que l’intérêt de la paix générale réclamait le retour de la vie politique de la France à un meilleur équilibre, que tout ce que nous regagnerions d’activité politique à l’intérieur serait infailliblement gagné par la paix et par la sécurité, et de témoigner l’espoir que l’amour intelligent de la paix ferait de M. de Persigny un partisan raisonnable des institutions libérales. Il n’y avait pas de sorcellerie dans notre prédiction ; nous avions simplement entendu chuchoter, depuis six semaines, que l’on s’occupait en haut lieu de quelque chose de semblable à ce que nous a donné le décret du 24 novembre, et en contrôlant une rumeur voilée par l’examen de ! a situation de l’Europe, nous nous étions convaincus de la nécessité d’une modification décisive de la politique intérieure du gouvernement.

Un remaniement ministériel a coïncidé avec les amendemens essentiels introduits dans la pratique de nos institutions. Un serviteur important et persévérant du régime actuel, M. Fould, quittait le ministère la veille du jour où la réforme était promulguée. Nous ne nous arrêterions point à ce fait, car le temps des questions et des crises de cabinet n’est pas encore venu, si la retraite de M. Fould n’avait pu donner lieu à une méprise. On a pu croire que M. Fould se retirait parce qu’il désapprouvait le changement opéré dans le système. Nous pensons qu’une telle supposition serait injuste envers un homme dont la perspicacité politique est généralement reconnue. Il faut chercher ailleurs l’explication de la retraite de l’ancien ministre d’état. Sur la question de réforme, bien loin de lui prêter une pensée de résistance, nous croirions volontiers que M. Fould, éclairé par les anciens souvenirs de nos assemblées, eût conseillé une restauration plus large du système parlementaire. O’Jant aux motifs personnels de sa démission, nous les abandonnons aux bruits de clubs et de salons. Nous ne nous arrêterons pas davantage pour le moment au remaniement qui s’est opéré dans diverses attributions ministérielles ; constatons seulement les importantes acquisitions du ministère d’état. Ce département gap,’no l’Institut et les haras. Au patronage des beaux-arts dont il jouissait déjà, il joint le haut patronage littéraire. Nous ne croyons pas que les académies aient à se plaindre de la mesure qui, dans leurs rapports avec le gouvernement, leur procure l’intermédiaire courtois de M. le comte Walewski. en les séparant du département de l’instruction publique.

Arrivons aux dispositions importantes du décret. Les changemens notables qu’il consacre peuvent se ramener à ces quatre points : la discussion d’une adresse dans les deux chambres, la publicité des débats parlementaires, le droit d’amendement conféré au corps législatif, et la participation de ministres sans portefeuille aux discussions des assemblées. Le public a bien fait, suivant nous, et nous ferons comme lui, d’attacher peu d’importance