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Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 31.djvu/1017

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REVUE. — CHRONIQUE.

priété appliqué à l’esclavage ; les états du nord sembleraient tout au plus disposés à rétablir l’ancien compromis du Missouri, que le sud lui-même avait répudié comme insuffisant.

L’Angleterre, par la bouche de la reine, a témoigné pour les États-Unis, dans cette perturbation qui met en question leur existence, une sympathie qui n’était point seulement remarquable par la noblesse du langage, mais par la sincérité du sentiment ; les inquiétudes que la crise d’Amérique inspire au commerce anglais sont assurément plus vives que celles que la situation du continent peut lui causer. L’opinion anglaise a paru accueillir avec satisfaction l’exposé que lord John Russell a présenté de sa politique étrangère dans la discussion de l’adresse. Le cabinet anglais a eu cet avantage d’être tout d’une pièce dans sa politique italienne, d’avoir vu se réaliser purement et simplement ce qu’il désirait, et d’avoir satisfait le public, dont il suivait l’impulsion. Quelques coups de boutoir lancés à l’adresse de la politique française avec cette raideur naïve et cette simplicité altière qui caractérisent lord John Russell n’ont pas peu contribué aux applaudissemens que lui ont donnés ses compatriotes ; mais pourquoi lui en garderions-nous rancune ? Lord John est aussi fervent que nous dans son attachement à la paix ; il fait des vœux pour que nous ayons un souverain aussi peu ambitieux que Louis XV et un ministre aussi peu belliqueux que le cardinal de Fleury. Il nous harcèlera sans doute un peu sur l’occupation de Rome ; mais peut-être une de ces brochures qui, selon son mot, sont devenues de nos jours des événemens lui donnera-t-elle bientôt satisfaction. Au demeurant, il est devenu plus coulant sur l’affaire de Syrie, et a fini par accepter la conférence, dont la réunion est annoncée pour un jour de la semaine prochaine.

E. Forcade.


REVUE MUSICALE.


Le théâtre de l’Opéra-Comique vient de faire une bonne rencontre, il a trouvé ce qu’il cherchait en vain depuis bien longtemps, ce que cherchent tant de gens et tant d’administrations, un succès, mot magique qui ouvre toutes les portes, adoucit tous les cœurs, talisman redoutable à qui rien ne résiste, surtout en France. Ayez du succès, n’importe de quelle nature il soit, et vous serez recherché, courtisé, choyé, aimé peut-être, au moins pendant toute une semaine. Le succès que nous sommes heureux d’annoncer aujourd’hui est le résultat de trois facteurs : de M. Auber d’abord, qui a fait la musique, de M. Scribe, qui a tracé le canevas et écrit les paroles, et du public parisien, qui s’est montré ce qu’il est souvent, intelligent, courtois et plein de bon vouloir pour le compositeur délicieux qui l’amuse et le charme depuis quarante ans. Oui, avant le lever du rideau, le public qui assistait à la première représentation de la Circassienne au théâtre de l’Opéra-Comique avait décidé que l’auteur de trente chefs-d’œuvre, que le