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« Le même au même.

« Saint-Pétersbourg, 25 janvier 1842.

« Monsieur,

« Grâce à vos lettres, à l’appui qu’elles m’ont prêté, la situation de la légation du roi est devenue excellente. Si la société russe, engagée dans une fausse voie, ne se presse pas d’en sortir, elle sent au moins ses désavantages.

« Au dernier bal, l’empereur s’est borné à me dire, en passant à côté de moi, d’un air et d’un ton qui n’avaient rien de désobligeant : « Comment ça va-t-il depuis que nous ne nous sommes vus ? Ça va mieux, n’est-ce pas ? »

« L’impératrice m’a demandé, avec une certaine insistance, quand revenait M. de Barante, et si je n’apprenais rien de son retour. J’ai répondu en protestant de mon entière ignorance à cet égard. Je ne puis décider si ce propos n’était qu’une marque de bienveillance pour l’ambassadeur, qui a laissé ici les meilleurs souvenirs, ou s’il cachait une intention, par exemple une sorte d’engagement implicite du retour de M. de Pahlen à Paris.

« Entre M. de Nesselrode et moi, pas un seul mot n’a été dit qui se rapportât à tout cet incident ou qui y fît allusion. Il m’a paru qu’il ne me convenait pas de prendre l’initiative. Je ne voulais, comme j’ai eu l’honneur de vous le dire, paraître ni embarrassé, ni inquiet, ni pressé de sortir de la situation qu’il a plu à la société de me faire, et dans laquelle rien ne m’empêche, surtout aujourd’hui, de me maintenir avec honneur. Dans un intérêt fort avouable de conciliation, je n’aurais certes pas évité une conversation confidentielle à cet égard que M. de Nesselrode aurait pu chercher. Sa modération m’est connue : j’ai la certitude qu’il regrette tout ce qui s’est passé ; mais je n’ai pas pensé qu’il fût utile d’aller au-devant d’explications que le caractère tout aimable de nos entretiens et la position supérieure du vice-chancelier lui rendaient facile de provoquer. »

J’étais parfaitement content de l’attitude de M. Casimir Périer, et je m’empressai de le lui témoigner.


« M. Guizot à M. Casimir Périer.

« Paris, 18 février 1842.

« Je ne veux pas laisser partir ce courrier, monsieur, sans vous dire combien les détails que vous m’avez mandés m’ont satisfait. Une bonne conduite dans une bonne attitude, il n’y a rien à désirer au-delà. Persistez tant que la société russe persistera. Son entêtement