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ses recettes en équilibre avec ses dépenses. Le prix moyen des dépêches télégraphiques a été pour l’année 1859 de 4 fr. 56 cent. : cela veut dire que, si les communications avaient été soumises à une taxe uniforme pour toute la France, il eût fallu, pour obtenir la même recette, que cette taxe eût été précisément égale à 4 fr. 56 cent., si l’on ne distingue pas les dépêches simples de celles qui ont plus de quinze mots. En tenant compte de cette distinction, on peut estimer que le prix de la dépêche simple eût été d’environ 4 francs. On se trouve donc encore, on le voit, à une bien grande distance du prix du timbre-poste des lettres ordinaires, et même des tarifs unitaires exceptionnels adoptés pour les dépêches départementales et bi-départementales.

Le prix moyen de 4 fr. 56 cent, ne peut être abaissé que par une double action, celle des expéditeurs et celle de l’administration. Jusqu’à présent, le personnel des expéditeurs est trop restreint et les intérêts- servis par la correspondance télégraphique sont d’un ordre trop spécial. En 1858, sur 100 dépêches de diverse nature échangées entre Paris et les départemens, 40 étaient relatives au commerce général et à l’industrie, 34 aux affaires de bourse, 20 seulement aux affaires privées et aux intérêts de famille, 4 aux nouvelles de journaux. Pendant l’année 1859, qui a fourni 453,998 dépêches intérieures, elles ont été classées de la manière suivante : commerce général et industrie, 44,27 pour 100 ; — affaires de famille et d’intérêt privé, 35,88 ; — affaires de bourse, 10,85 ; — commerce des céréales, 5,50 ; — publicité et journaux, 2,77 ; — affaires diverses, 0,73. La diminution considérable des dépêches de bourse a été attribuée à la suppression de la coulisse et au marasme des affaires de spéculation ; en revanche, on doit se féliciter de voir là part des dépêches d’intérêt privé s’élever à un taux supérieur. Cependant cette part est encore beaucoup trop faible : le télégraphe est encore trop exclusivement employé par les gens d’affaires, et cette abstention de la masse du public fournit un des principaux argumens à ceux qui résistent à la diminution des tarifs. Ils font valoir que les expéditeurs actuels mettent le télégraphe au service d’intérêts trop considérables pour que la question des prix les arrête et soit pour eux une gêne véritable.

Si l’on compare les tarifs de la télégraphie intérieure en France avec ceux des autres pays, on obtient toutefois des résultats assez favorables. M. Blavier, professeur de télégraphie et auteur d’un excellent traité sur la science qu’il enseigne, a montré que les pays où l’expéditeur est le plus favorisé sont les royaumes de Wurtemberg, de Saxe et de Bavière pour les petites distances, ceux de Danemark, de Suède et de Norvège pour les grandes distances. En Wurtemberg, les taxes sont uniformes ; on paie 70 centimes pour vingt mots, l.fr. 05 cent, pour trente ; en Saxe, 80 centimes pour