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ouvert des portes qui donneront accès à bien des innovations à peine rêvées, et certes inattendues. Tout en ne cédant que pour elle aux sollicitations réitérées des hommes intelligens, elle a de fait amené les nations les plus favorisées à la jouissance des avantages spéciaux stipulés en vue de ses intérêts propres, — avantages inaperçus pour le moment, mais qui se feront bientôt sentir, particulièrement en Angleterre. Les derniers événemens survenus en Italie ont altéré la carte d’Europe et modifié dans un sens libéral l’élément fiscal et industriel de la péninsule. L’Espagne a fait un pas considérable vers une ère nouvelle de prospérité publique : là où il n’y avait qu’une consommation contrariée, emmaillottée par de vieilles entraves douanières, là où la culture du sol se débattait contre des dîmes, des droits prohibitifs ou insupportables, il y aura accroissement des produits de la terre et plus d’aisance, augmentation des besoins des populations et possibilité d’implanter la production industrielle. Les rayons de ce soleil qui n’éclairait que deux ou trois points du monde arriveront jusqu’à d’autres, également favorisés par leur position géographique ou par les moyens que la nature leur offrira de se procurer de la force motrice à bon marché. S’il n’est pas absolument vrai que le pays qui fournit la matière première doive, à l’exclusion de tout autre, fabriquer les articles auxquels cette matière est propre, il ne serait pas moins faux d’affirmer qu’une contrée qui a, comme l’Angleterre, par le concours de certaines circonstances, acquis une suprématie industrielle, puisse en rêver le privilège absolu. Les prétentions de la Grande-Bretagne, justes encore en ce qui concerne quelques branches de son industrie métallurgique, ne résisteraient pas à la logique des faits en matière d’industrie cotonnière, si la révision des tarifs avait lieu partout où la nécessité s’en fait sentir en Europe. Or la question, selon toute apparence, ne tardera pas à être reprise et décidée dans le sens d’une liberté entière. Une autre raison à l’appui de cet argument se tire de l’élan donné en Belgique, en Suisse et en Allemagne à la construction perfectionnée des machines à vapeur, des métiers, etc., qui constituent le matériel fondamental de l’industrie du coton, matériel qui est fourni par ces contrées à un prix très inférieur à celui qu’on demanderait en France, et presque égal à celui des ateliers anglais.

Que toute l’Italie soit une fois pacifiée et unie, et l’on verra bientôt des filatures s’y créer, ainsi que cela vient d’avoir lieu en Lombardie sur la frontière helvétique. Il n’en coûtera pas plus cher de livrer des balles de coton dans les ports italiens que sur les côtes d’Angleterre. La différence du prix de main-d’œuvre et des dépenses générales, bien moins élevées que dans le royaume-uni, comblerait