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VALVÈDRE


À MON FILS.


Ce récit est parti d’une idée que nous avons savourée en commun, que nous avons pour ainsi dire bue à la même source : l’étude de la nature. Tu l’as formulée le premier dans un travail de science qui va paraître. Je la formule à mon tour et à ma manière dans un roman. Cette idée, vieille comme le monde en apparence, est pourtant une conquête assez nouvelle des temps où nous vivons. Pendant de longs siècles, l’homme s’est pris pour le centre et le but de l’univers. Une notion plus juste et plus vaste nous est enseignée aujourd’hui. Plusieurs la professent avec éclat. Adeptes fervens, nous y apporterons aussi notre grain de sable, car elle a besoin de passer dans beaucoup d’esprits pour faire peu à peu à tous le bien qu’elle recèle. Elle peut se résumer en trois mots que ton livre explique et que le mien tentera de prouver : sortir de soi. — Il est doux d’en sortir ensemble, et cela nous est arrivé souvent.

Tamaris, 1er  mars 1861.




I.

Des motifs faciles à apprécier m’obligeant à déguiser tous les noms propres qui figureront dans ce récit, le lecteur voudra bien n’exiger de moi aucune précision géographique. Il y a plusieurs manières de raconter une histoire. Celle qui consiste à vous faire parcourir une contrée attentivement explorée et fidèlement décrite est, sous un rapport, la meilleure : c’est un des côtés par lesquels le