quitté ses amis, qui étaient si heureux de le posséder. Sans répondre d’une manière bien nette, Tannhäuser dit qu’il a commis une grande faute, et qu’il faut qu’il l’expie en s’éloignant de tout ce qu’il aime. Un ami, Wolfram, lui dit alors tout bas : « Tu oublies donc Élisabeth, la noble nièce du landgrave, qui a perdu les grâces et l’enjouement de sa jeunesse depuis que tu nous as quittés ? » À ce nom adoré, Tannhäuser se décide à revenir à la cour du landgrave de Thuringe. Ainsi finit le premier acte.
Le second acte transporte la scène à la Wartbourg, dans la grande salle des chanteurs, où Tannhäuser, conduit par Wolfram, pénètre et retrouve Élisabeth, le cœur tout rempli de son souvenir, Après la reconnaissance des deux amans et les explications qui s’ensuivent a lieu la fête des chanteurs, commandée par le landgrave pour célébrer une date glorieuse de l’histoire nationale. Le landgrave est un grand protecteur de l’art de bien dire et du gai savoir. En présence des seigneurs et des grandes dames de la Thuringe, le landgrave déclare du haut de son trône que celui qui aura le mieux approfondi la nature de l’amour et son influence sur la destinée de l’homme recevra pour récompense la main d’Élisabeth. À cette proposition, qui excite l’ambition de tous les poètes chanteurs, Wolfram d’Eschenbach se lève, prend sa lyre, et chante les merveilles du véritable amour, de l’amour idéal, qui est chose si haute, comme le disait un poète français de la même époque, Chrétien de Troyes. L’assemblée applaudit chaudement aux nobles paroles de Wolfram, ce qui pique la vanité de Tannhäuser, qui se lève brusquement, et, sur sa lyre frémissante, se met à célébrer une passion moins chaste et moins contenue, celle qui aspire tout simplement à la possession de l’objet aimé. Élisabeth, qui est partiale pour Tannhäuser, qu’elle aime secrètement, paraît approuver cette manière d’envisager l’amour ; mais le reste de l’assemblée en est scandalisé. Un troisième chanteur, Walther, réplique à Tannhäuser que l’amour véritable est comme la vertu, qui se fortifie par la lutte et l’abstinence, et succombe par la satiété, et que c’est dans le cœur seul que fleurit cette belle fleur de l’idéal. Tannhäuser, qui n’a pas oublié le séjour qu’il a fait au Venusberg, persiste à dire qu’il ne comprend rien à cet amour abstrait de l’intelligence, et que, pour lui, il ne connaît d’autre amour que celui qui a peuplé l’univers. Ces paroles excitent dans l’assemblée une profonde indignation. Tout le monde s’écrie : « Il est perdu ! il est damné ! il a laissé son âme au Venusberg ! » Élisabeth le défend, au péril de sa vie, contre ses ennemis acharnés, qui tous ont mis l’épée à la main. Le landgrave, d’un front sévère, ordonne alors que Tannhäuser soit expulsé de sa cour et du pays de la Thuringe. Tannhäuser, revenu un peu à de meilleurs sentimens, prend la résolution d’aller en pèlerinage à Rome pour y reconquérir la grâce du baptême, qu’il a perdue. Le troisième acte offre aux regards la vallée de la Wartbourg, où la pauvre Élisabeth est agenouillée au pied d’une image de la vierge Marie, dont elle invoque l’intercession pour le salut de Tannhäuser, qu’elle attend en vain depuis si longtemps. Tannhäuser apparaît bientôt sous un costume de pèlerin, et il raconte à Wolfram, qui se trouve là sur la route, le résultat de son voyage à Rome. Le pape n’a pas exaucé sa prière, et il lui a répondu que, tant qu’il ne pousserait pas des feuilles sur le bout de sa crosse, Tannhäuser n’obtiendrait