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j’aime tant les fleurs ! Du reste, chez nous chacun est libre de faire ce qui lui plaît. Liberté entière.

MOUKHINE.

C’est charmant !

MADAME LIBANOF

C’est mon principe… Je ne puis souffrir l’égoïsme. C’est chose assommante pour les autres et fatigante pour soi-même. Demandez-leur à tous, (Varvara Ivanovna sourit d’un air mielleux.) Mais pourquoi n’allez-vous pas vous promener ?

GORSKI.

Oui, allons au jardin.

VERA, vivement.

Non, non ; à cette heure, il fait trop chaud.

MADAME LIBANOF

Comme vous voudrez. (A Moukhine.) Nous avons un billard… Du reste, vous le savez, liberté entière… Quant à nous, capitaine, nous allons nous mettre aux cartes… C’est un peu tôt ; mais puisque Vera dit qu’on ne peut pas se promener…

TCHOUKHANOF, qui n’a pas du tout envie de jouer.

Volontiers, volontiers, chère dame… Pourquoi trop tôt ? Il faut que vous preniez votre revanche.

MADAME LIBANOF

Certainement,… certainement… (A Moukhine.) On dit,… monsieur Moukhine,… que vous aimez le boston… Ne voudriez-vous pas ?… Mlle Bienaimé ne sait pas jouer, et voilà longtemps que. je n’ai fait une partie à quatre.

MOUKHINE.

Je… certainement,… avec plaisir…

MADAME LIBANOF

Vous êtes fort aimable ; mais pas de cérémonie, je vous prie.

MOUKHINE.

Nullement, madame,… je suis ravi…

MADAME LIBANOF

Eh bien ! allons… Nous ferons notre partie au salon ;… la table est déjà préparée… Monsieur Moukhine, donnez-moi votre bras… (Elle se lève.) Et vous, Gorski, organisez quelque chose pour la journée, entendez-vous ? Vera vous aidera… (Elle se dirige vers le salon. )

TCHOUKHANOF, s’approchant de Varvara Ivanovna.

Permettez-moi de me mettre à vos ordres…

VARVARA IVANOVNA, avec dépit, en acceptant son bras.

Encore vous ! (Mademoiselle Bienaimé s’assied à gauche et prend sa broderie d’un air affairé. Vera se met ou piano. Gorski s’approche d’elle doucement.)

GORSKI, après un moment de silence.

Que jouez-vous donc là, Vera Nicolaevna ?

VERA, sans le regarder.

Une sonate de Clementi.