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au clergé séculier, pour les distinguer des abbés réguliers élus par les moines. Située au bord de la Loire, au pied du plateau de Sancerre, l’abbaye de Saint-Satur était une des plus anciennes et des plus célèbres du Berri ; on admire encore les restes de son église, mais l’abbaye elle-même avait été supprimée peu avant la réunion de l’assemblée, en même temps que Fontgombaud, la sainte chapelle de Bourges, et Saint-Benoît-de-Fleury. La révolution a fait beaucoup de ruines en ce genre ; elle ne les a pas toutes faites, et les chefs du clergé avaient commencé, bien avant 1789, à réduire le nombre des établissemens monastiques. M. de Véri, qui avait conservé le nom d’abbé de Saint-Satur, avait contribué lui-même à la suppression de son abbaye : c’était un prêtre philosophe qui avait fait partie, avec Turgot, l’abbé de Brienne, l’abbé de Boisgelin, de ce petit groupe d’amis vivant et étudiant ensemble à la Sorbonne dont l’abbé Morellet nous a laissé dans ses mémoires un si vivant portrait. La France lui doit le ministère de Turgot, car c’est lui qui avait suggéré à M. de Maurepas, dont il était connu, l’idée d’appeler au pouvoir son ancien condisciple. M. de Séguiran, abbé du Landais, se distinguait, comme l’abbé de Véri, par l’esprit le plus libre et le plus éclairé. Le Landais était une assez pauvre abbaye, située, comme son nom l’indique, dans un pays tout couvert de landes, et qui ne rapportait à son abbé que 3,500 livres de rente. Le quatrième membre du clergé, M. de Vélard, qui représentait le chapitre métropolitain, ne justifia pas moins le choix du ministre.

Dans la noblesse, il faut remarquer le comte Du Buat ; quoiqu’il n’appartînt pas au Berri par sa naissance, il y possédait la terre de Neuvy-sur-Baranjon. Longtemps ministre plénipotentiaire en Allemagne, il s’était retiré dans son château de Nançay et y avait écrit plusieurs volumes de politique et d’histoire fort estimés de leur temps, oubliés aujourd’hui en France, mais dont quelques-uns sont restés classiques en Allemagne. La terre de Lancosme, qui avait fourni un autre membre de la noblesse, existe encore dans la Brenne, près du Blanc ; elle a près de 8,000 hectares. Quant aux représentans du tiers-état, ils n’avaient acquis aucune illustration hors de leur province, mais ils y étaient tous connus et estimés. L’un d’eux, M. Guimond de La Touche, devait être le fils ou le neveu de l’auteur tragique de ce nom, né lui-même à Châteauroux, et dont l’Iphigênie en Tauride avait alarmé un moment par son succès l’inquiète susceptibilité de Voltaire.

Le 5 octobre 1778 se tint dans la grande salle du palais archiépiscopal de Bourges une réunion préliminaire des seize pour nommer les trente-deux qui devaient les compléter. Furent élus : pour le clergé, l’abbé de Saint-Martin de Châteauroux, l’abbé de Barzelles, l’abbé de Chezal-Benoît, quatre prieurs et un chanoine ; pour la noblesse,