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de Conques, de Bonnecombe, de Bonneval, de Loc-Dieu, de Nant, de Sylvanès, et jusqu’aux abbesses de deux couvens de femmes. La noblesse n’y comptait pas moins de soixante représentans, car ces montagnes portaient de nombreux châteaux-forts, dont les habitans ont pris une part active à toutes les luttes de notre histoire, depuis les croisades jusqu’aux guerres de religion. Les consuls, jurats et syndics de soixante-dix villes ou bourgs, dont la moitié ne sont même pas aujourd’hui des chefs-lieux de canton, formaient le tiers-état[1]. Cette assemblée, qui ne devait pas compter moins de deux cents membres pour l’étendue actuelle d’un seul département, se réunit pour la dernière fois à Villefranche le 27 août 1651. L’évêque de Rodez, qui aurait dû présider, était Hardouin de Péréfixe, le précepteur de Louis XIV et l’auteur de la Vie de Henri IV ; mais ce prélat était absent ainsi que le dom d’Aubrac : la cour attirait dès lors loin de leur résidence et de leurs devoirs le haut clergé comme la haute noblesse.

Nous n’avons pas de détails aussi précis sur les anciens états du Quercy que sur ceux du Rouergue. Nous savons seulement que leur composition devait être à peu près la même et qu’ils se réunissaient alternativement dans les quatre villes de Cahors, Montauban, Figeac et Moissac, et dans les quatre châtellenies de Caylus, Lauzerte, Gourdon et Montcuq. Ils existaient avant le XIIIe siècle, puisque Simon de Montfort les réunit à Figeac en 1214. C’étaient eux qui, sous Henri II, avaient racheté la gabelle en payant un faible capital. Ils paraissent s’être soutenus jusqu’à Richelieu. « Ce ministre, dit l’historien du Quercy, créa en 1635 une intendance à Montauban, et dès lors tout espoir de voir rétablir les états du pays fut perdu. » En 1642, une cour des aides fut créée à Cahors, puis transférée à Montauban. La petite vicomte de Turenne, enclavée dans le Quercy, avait eu aussi ses états particuliers, qui se réunissaient à Martel.

Cette destruction des libertés locales avait eu dans la Haute-Guienne les mêmes conséquences qu’en Berri. Suivant toutes les apparences, la population du Rouergue et du Quercy était la même vers la fin du XVIe siècle que deux cents ans après. Fromenteau, dans son Secret des finances, écrit en 1581, évalue à 65,000 le nombre des familles du Rouergue, ce qui, à cinq personnes par famille, donnerait un total de 325,000 âmes ; en supposant que le Quercy en eût proportionnellement 225,000, on arrive à un total de 550,000, ou à très peu près ce qu’a donné le dénombrement de 1790. La

  1. J’ai dépouillé, pour l’exposé qu’on va lire, les procès-verbaux imprimés de l’assemblée ; je me suis aussi beaucoup servi d’un excellent Essai sur l’assemblée provinciale du Berri, publié à Bourges en 1845 par M. le baron de Girardot, conseiller de préfecture du Cher, qui a eu à sa disposition les archives du département.